Le Quotidien du pharmacien.- La crise du coronavirus a-t-elle exacerbé le phénomène de ruptures en médicaments anciens ?
Bruno Bonnemain.- Oui et non. Certains produits anciens sont concernés, mais c’est surtout l’augmentation soudaine de la demande qui a provoqué un problème. Par exemple, la demande en curare a été multipliée par 9 ou 10 en un mois, donc l’industrie n’a pas pu suivre. Heureusement, la cellule de crise du ministère de la Santé a pu trouver des sources ailleurs, en Chine et en Russie.
Aux États-Unis, pays également confronté aux ruptures, des solutions ont été mises en place, avec une certaine efficacité. Pourrait-on s’en inspirer ?
Bruno Bonnemain.- Les États-Unis ont beaucoup réagi en privilégiant la production nationale. Ainsi, le président Donald Trump a mis en place des mesures pour obliger les industriels à se fournir aux États-Unis. De plus, il y a des échanges fournis entre la FDA et les industriels afin de trouver des solutions. En France, on commence à faire de même, mais on en est aux balbutiements ! Par ailleurs, les États-Unis ont mis en place un système particulier en créant, fin 2018, la société Civica. Il s’agit d’une structure financée par des hôpitaux privés américains et quelques investisseurs, dont le but est de produire des médicaments fréquemment en rupture dans le pays et dont le prix a flambé, puis de les vendre à des prix négociés aux hôpitaux. C’est comme une centrale achat qui fournit sans rupture des médicaments aux hôpitaux en leur vendant à un prix juste. De plus, pour ne pas se retrouver en situation de monopole, Civica se limite à 50 % des achats des hôpitaux. Aujourd’hui, Civica fournit ainsi une vingtaine de médicaments. Mais cette solution n’est pas transposable en France, car les hôpitaux fonctionnent par appels d’offres.
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