LES PRÉPARATIONS officinales sont en péril. Pour cet emblème du métier officinal, c'est aujourd'hui une question de vie ou de mort. La situation est telle qu'elle a provoqué le sursaut de pharmaciens organisés en associations (TOP ACTO, SOTP) et de fournisseurs de matières premières à usage pharmaceutique (Cooper, Fagron, Phytoprevent). Des enseignants et des représentants professionnels ont rejoint le mouvement. Pour ce collectif de défense de la préparation, ses difficultés sont nombreuses. Si l'arrivée des Bonnes pratiques de préparation (BPP) opposables, en 2008, a renforcé la qualité de fabrication, certaines rigidités perdurent. Doté d'une soixantaine de préparations, le Formulaire national n'offre que peu de latitudes aux officinaux. « La majorité des formules rajoutées dernièrement ne concerne que la pratique hospitalière. Il n'a pas été enrichi de formules à destination du pharmacien d'officine », regrette Jean Kelber, président de l'association TOP ACTO. Ce pharmacien alsacien l'affirme sans détours : « Le Formulaire national est un recueil obsolète et inadapté pour les officinaux ». Pendant ce temps, le marché a évolué. Il s'est libéralisé ces dernières années. Aujourd'hui, près de 150 plantes, contre 34 autrefois, peuvent être vendues en dehors des pharmacies. Les huiles essentielles, substances potentiellement dangereuses, sont disponibles dans des magasins bio ou sur Internet. Sans garanties qu'elles ne sont pas falsifiées, argumente le collectif de professionnels. À l'officine, c'est le contraire. Les règles sont plus dures. L'inspection de la pharmacie peut très bien ne plus autoriser la préparation de mélanges de plantes ou d'huiles essentielles. Il y a aussi deux poids deux mesures dans l'attitude des inspecteurs vis-à-vis des préparations officinales « maison », dont les formules sont souvent transmises depuis des générations. Certains les tolèrent, d'autres pas.
Certes, les préparations officinales ne concernent que 10 à 15 % des pharmacies, soit quelques milliers d'entre elles. Mais cette activité mérite d'être dépoussiérée. Remise au goût du jour, elle pourrait susciter de nouvelles vocations, estime le collectif de défense de la « prép » qui vient d'émettre des recommandations en ce sens. Son rapport a été remis la semaine dernière au ministère de la Santé. Les militants de la préparation vont aussi réunir, d'ici à l'été, l'Ordre des pharmaciens et les syndicats professionnels, dont ils recherchent le soutien. Ils mettront alors sur la table les 5 revendications, qui suivent :
1) Redéfinir la préparation officinale.
Selon le code de la santé publique, est considéré comme préparation officinale « tout médicament préparé en pharmacie, inscrit à la Pharmacopée ou au Formulaire national et destiné à être dispensé directement aux patients approvisionnés par cette pharmacie ». Pour le collectif de professionnels, la définition européenne de la préparation officinale a été mal traduite en droit français (loi du 26 février 2007). Les termes « inscrits à la Pharmacopée ou au Formulaire national » ont remplacé la formule « selon les règles de la Pharmacopée », admise dans d'autres pays. Cette nuance a son importance. Elle restreint l'autonomie du pharmacien dans son activité de préparation. Il est strictement limité aux formules officielles alors qu'il pourrait s'appuyer sur son savoir-faire pour fabriquer des médicaments.
2) Reconnaître les Formulaires des États membres de l'Union européenne.
La reconnaissance des compositions effectuées dans d'autres pays permettrait d'enrichir notre Formulaire national. En Belgique, par exemple, de nouvelles formules sont développées en collaboration avec des cliniciens et validées par des universitaires avant d'être réalisées dans les officines.
3) Faire une télédéclaration des formules auprès des autorités sanitaires.
Cela se fait déjà à l'hôpital, mais pas à l'officine. Depuis novembre 2004, en effet, les pharmaciens hospitaliers, mais aussi ceux qui assurent la gérance d'une pharmacie à usage intérieur, sont obligés de déclarer à l'AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) les préparations qu'ils réalisent. C'est la DEMEB (Direction de l'évaluation des médicaments et des produits biologiques) qui se charge de collecter et de contrôler ces préparations. Elle pourrait aussi tenir ce rôle vis-à-vis des préparations officinales. Et les rédacteurs du rapport estiment que les préparations les plus fréquemment déclarées pourraient être ajoutées au Formulaire national. Leur fabrication serait ainsi standardisée.
4) Faire évoluer la Commission du Formulaire national.
Cette Commission, qui dépend de l'AFSSAPS, ne comporte aujourd'hui que deux officinaux, sur une vingtaine de membres. Il est donc proposé que cette entité s'ouvre plus largement aux aspirations officinales.
5) Redéfinir le périmètre des préparations officinales.
Pour éviter des interprétations hasardeuses, le périmètre de ces préparations devra être redéfini. Ainsi sont-elles autorisées en herboristerie (mélanges de plantes), phytothérapie (poudres et extraits de plantes), aromathérapie, homéopathie et dermopharmacie.
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