Le débat sur le prix des médicaments n’est pas nouveau mais il fait rage actuellement, avec la campagne très médiatisée de Médecins du monde et l’appel de 110 cancérologues ces derniers mois. Invité au Café Nile le 7 septembre, Noël Renaudin, ancien président du Comité économique des produits de santé (CEPS), estime que ce débat est stérile, chacun campant sur ses positions : la société civile dans une vision morale et les laboratoires dans une approche industrielle. Cependant, tous tombent d’accord pour dire que « tout ce qui peut être trouvé doit être cherché, toute recherche doit être financée et toute découverte doit être rendue accessible à tous ». Cette demande sur le marché du médicament, qui consiste à tout vouloir et à ne pas choisir, est « totalement déraisonnable » et serait à l’origine d’une offre actuellement trop élevée. Il faut donc « prendre conscience collectivement qu’on ne peut vouloir tout et décider du prix ».
« Auparavant, je pensais que ce n’est pas parce qu’on est atteint d’une maladie chère à traiter qu’on doit être privé de la solidarité nationale. J’ai changé d’avis car, aujourd’hui, les maladies orphelines occupent une part considérable et pèsent trop lourd. » Désormais le nombre des innovations explose, alors que les ressources financières se raréfient. Et c’est justement dans un tel contexte qu’a vu le jour le principe de l’AMM (autorisation de mise sur le marché) conditionnelle, « cette erreur dramatique qui cherche à faire venir plus vite des innovations non étudiées, alors qu’on ne sait déjà pas quoi faire pour rembourser les innovations étudiées », s’offusque Noël Renaudin.
Faire des choix
C’est pourquoi renoncer à ces AMM conditionnelles serait la première mesure que l’ancien président du CEPS prendrait s’il en avait le pouvoir. Ce n’est pas tout, il imagine aussi d’imposer un tarif aux produits obtenant une autorisation temporaire d’utilisation (ATU). « Le principe de l’ATU est merveilleux, mais son prix est scandaleux. À ce stade, le compassionnel devrait primer et le tarif devrait être limité au coût de production. » Noël Renaudin revendique l’idée d’un pilotage plus fin des indications, dont le choix ne devrait pas être laissé aux seuls industriels, qui « créent des distinctions artificielles dans certaines catégories de traitements ». Enfin, il réclame la fin des contrats de performance, inventés initialement par les pouvoirs publics pour tester « en vie réelle des médicaments correctement développés », et détournés désormais par les industriels « pour mettre sur le marché des produits à potentiel qui n'ont pas apporté de démonstrations suffisantes mais qui visent un besoin non couvert ».
Mais l’ensemble de ces solutions visent à maîtriser l’offre, donc les industriels, alors que le fond du problème est bien, aux yeux de Noël Renaudin, le comportement des demandeurs. Pour lui, il ne faut pas confondre la somme des intérêts particuliers et l’intérêt général qui, lui, correspond à « la solvabilité de notre système de soins et commande de choisir ». Rappelant que la plupart des pays « ne paient pas pour tout et pour tout le monde », il note que la France est tellement accoutumée à payer pour tout et tout le monde qu’elle est même organisée « pour chercher chaque malade de maladie orpheline et ainsi ne rater personne ». En résumé, il convient désormais de faire des choix, de ne pas chercher à soigner tout et tout le monde à tout prix, de ne plus accepter tous les médicaments… « Je suis conscient que c’est un discours politiquement intenable et que ces décisions très techniques devraient donc être réglées par les institutions de l’État et non par les politiques. »
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