Sauriez-vous distinguer un comprimé rond blanc d'un autre comprimé rond blanc, sans autres indices ? La tâche est rude mais pas impossible, à condition de disposer de données fiables.
Cette banque de données existe en France ; c'est la base de données d'identification des formes pharmaceutiques solides et orales, créée et gérée par le centre antipoison et de toxicovigilance de Nancy. Depuis près de 50 ans, cet outil est mis à la disposition (1) des professionnels de santé et des patients qui cherchent à reconnaître un comprimé égaré au fond d'un pilulier, ou une gélule soupçonnée d'intoxication accidentelle ou volontaire. « C'est une base nationale, dans le sens où nous menons cette activité pour l'ensemble du territoire. En revanche, nous n'avons jamais disposé de financement public, d'où certaines limites de développement », explique le Dr Elisabete Gomes, pharmacien gestionnaire de cette base.
Un référencement informatique et physique
La base comptabilise aujourd'hui 12 965 comprimés et 3 841 gélules, correspondant aux spécialités médicamenteuses commercialisées ou ayant été commercialisées en France. « Faute de dépôt légal, cette pharmacothèque n'est pas exhaustive mais on s'en rapproche. En plus des comprimés et des gélules, nous référençons aussi les formes solides qui peuvent s'apparenter, les ovules par exemple ». Chaque dosage et chaque forme galénique solide sont enregistrés informatiquement et stockés physiquement dans les locaux du centre antipoison, dans des tiroirs comme en pharmacie. « L'odeur peut être un critère d'identification, d'où l'importance de disposer des médicaments ». Il y a quelques années, la base référençait aussi des bonbons susceptibles d'être confondus avec des médicaments mais ce n'est plus le cas faute de place. « Nous ne sommes pas non plus pas en mesure d'étendre cette base aux compléments alimentaires, bien que ce soit tout à fait pertinent », regrette Elisabete Gomes. Même problématique pour les médicaments sous forme liquide : « disposer d'une base de données pour les formes orales liquides est un axe de développement parce que nous sommes souvent confrontés à des cas d'erreurs liées à la confusion des dispositifs d'administration ».
Un travail exigeant et permanent
La mise à jour de la base est fastidieuse, et impose d'aller à la pêche aux informations. « Les laboratoires ne nous envoient pas systématiquement leurs nouveaux médicaments, ou ne nous informent pas d'une modification galénique, même mineure. Nous effectuons donc une veille régulière dans les revues professionnelles qui relaient l'actualité du médicament. Nous bénéficions également d'un accès à la base Codex de l'ANSM pour identifier les nouveautés », détaille Elisabete Gomes. « Pour notre stock, les laboratoires sont généralement compréhensifs, à quelques exceptions près, et envoient une boîte échantillon ».
La fiche d'identification du comprimé
Avant de stocker les médicaments, ces derniers sont décrits minutieusement. Les caractéristiques visuelles (forme, couleur interne et externe, barre de sécabilité, logo ou inscription) et olfactives, les dimensions et le poids, tout est précisément noté et une photographie numérique est réalisée. En 2017, le CAPTV de Nancy a reçu 122 appels de demande d'identification de formes orales solides, dont 46 situations d'urgence correspondant à une intoxication médicamenteuse volontaire ou accidentelle. Une demande sur 3 émanait d'un pharmacien, et dans 1 cas sur 5, d'un pharmacien d'officine. « Avec les systèmes de PDA (préparation des doses à administrer), le pharmacien se trouve de plus en plus confronté à devoir identifier un comprimé déconditionné. Nous croisons les données, nos critères d'identification avec les données de prescription ou d'achat par le patient. Le résultat ne nous permet pas toujours d'identifier précisément le médicament, mais au moins d'établir une liste réduite de candidats possibles », observe Elisabete Gomes. Pour faciliter l'identification, les pharmaciens peuvent envoyer une photo (2) du comprimé ou de la gélule inconnue : « dans ce cas, il faut mettre le comprimé près d'une échelle graduée ou à défaut, près d'une pièce de monnaie qui fait office d'étalon », recommande notre consœur du centre antipoison de Nancy.
(1) Numéro d'appel pour la France entière : 03 83 22 50 50 (2) Envoi de photo : cap@chru-nancy.fr
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