?C’EST, sans surprise, Marisol Touraine qui a été nommée ministre des Affaires sociales et de la Santé du gouvernement de Jean-Marc Ayrault (voir notre article en page 4). L’une de ses premières tâches sera de préparer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2013. Si le candidat socialiste a fait campagne sur le thème du changement, le prochain budget de la Sécu devrait toutefois s’inscrire dans la continuité des précédents. En effet, la situation économique reste difficile. Les prévisions de croissance pour l’année prochaine sont en deçà des perspectives envisagées par François Hollande : 1,3 %, contre 1,7 %. « Je mesure aujourd’hui même le poids des contraintes auxquelles notre pays fait face : une dette massive, une croissance faible, un chômage élevé, une compétitivité dégradée, une Europe qui peine à sortir de la crise », a déclaré le nouveau président de la République, lors de son investiture.
Dans ce contexte, il y a fort à parier qu’un nouveau tour de vis sur le poste médicament sera effectué. D’ailleurs, François Hollande a clairement dit pendant la campagne qu’afin de sécuriser l’accès aux soins de tous les Français, il était nécessaire, entre autres, de favoriser la baisse de prix des spécialités pharmaceutiques. En particulier, sur les génériques. Ces médicaments sont, « en France, plus chers que chez la plupart de nos voisins », estime ainsi François Hollande. Pourtant, une étude réalisée en 2011 à la demande du Gemme (1), révèle que, dans l’Hexagone, les prix des génériques sont inférieurs de 4 % à la moyenne européenne, et même de 12 % si l’on rapporte ce résultat au coût de la vie (« le Quotidien » du 14 mars 2011). Toutefois, d’autres chiffres montrent que les prix de certaines « copies » sont nettement plus élevés dans l’Hexagone, telle ceux de l’oméprazole ou de la simvastatine (2).
Dans la moyenne.
Quoi qu’il en soit, d’une manière générale, le LEEM (3) indique que les prix des médicaments en France sont dans la moyenne basse européenne. « La récente polémique sur des ruptures d’approvisionnements en médicaments dans les pharmacies avait, entre autres, pour cause les bas prix des médicaments vendus en France », argumente le syndicat de l’industrie pharmaceutique. Quant à l’idée que le coût des médicaments pèse sur les comptes de la Sécurité sociale, le LEEM rappelle que les spécialités remboursables représentent « seulement 18 % des dépenses, soit moins d’un euro sur cinq ». Enfin, le syndicat de l’industrie doute de l’existence d’une corrélation entre réduction tarifaire et amélioration de l’accès aux soins, comme le suggère François Hollande. « Avec une assurance-maladie aujourd’hui généralisée et une couverture complémentaire pour plus de 94 % de la population, baisser le prix des médicaments est sans lien avec l’accès aux soins innovants, nécessaires au traitement des pathologies de nombreux malades », explique le LEEM. Au contraire, estime-t-il, « la recherche et la commercialisation de ces médicaments innovants se feraient principalement dans d’autres pays que la France ». Au final, « les patients auraient plus de mal à accéder à ces soins innovants ».
On le voit, la crise n’est pas encore derrière nous. Et le nouveau gouvernement devra encore s’appliquer à résoudre la difficile équation qui consiste à réduire le déficit des comptes sociaux tout en ménageant une industrie pharmaceutique garante de milliers d’emplois en France.
(2) Dans un entretien avec « le Quotidien », Nicolas Dupont-Aignan explique que le prix de la simvastatine en Angleterre est de 1,05 euro la boîte hors frais de dispensation et de 5,64 euros en Italie, contre 12,92 euros en France ; celui de l’oméprazole est de 1,59 euro (hors frais de dispensation) en Angleterre, contre 14,19 euros dans l’Hexagone (notre édition du 10 avril).
(3) Les entreprises du médicament.
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