Il existe trois causes de ruptures de médicaments. Des causes techniques, économiques et réglementaires.
En premier lieu, les causes techniques sont strictement industrielles. Elles peuvent être dues à la croissance de la demande mondiale dans certaines formes pharmaceutiques spécifiques, comme les injectables ou les produits lyophilisés, et les industriels ne peuvent alors pas suivre. On peut également incriminer la délocalisation de la fabrication des matières premières et des produits finis, qui passent désormais par la Chine, l’Inde… Le processus de confection et de distribution devient si complexe qu’il s’enraye au moindre grain de sable. Or c’est la production des médicaments anciens, génériqués, qu’on délocalise. Pas celle des médicaments innovants et chers, qui, elle, reste européenne.
La deuxième raison est économique : les médicaments anciens, devenus peu chers, ne dégagent pas assez de marge. Les industriels n’investissent plus dessus, voire abandonnent leur commercialisation. En revanche, il existe certaines entreprises qui surfent alors sur cette vague des produits abandonnés, et reprennent des anciennes AMM. Par exemple, le Laboratoire Majorelle, qui exploite et valorise les molécules dont le brevet a expiré, en particulier dans l’urologie et la gynécologie. Son savoir-faire est de reprendre le développement de traitements afin de les rendre plus faciles à prendre, donc mieux suivis par les patients, et à des prix compétitifs car les molécules ne sont plus protégées. Autre exemple : l’entreprise marseillaise Provepharm, qui a notamment réussi à purifier le bleu de méthylène, produit devenu interdit en raison de présence de métaux lourds. En le débarrassant de ses impuretés, le laboratoire a pu commercialiser à nouveau le produit, sous forme injectable, en tant que traitement d’un empoisonnement du sang (méthémoglobinémie) induit par des médicaments ou des produits chimiques.
La dernière cause de rupture est d’ordre réglementaire. En effet, on observe une augmentation régulière des réglementations (bonnes pratiques de fabrication qui sont passées de 50 à 300 pages, variations, datamatrix et sérialisation, etc.) et des coûts associés. Autre exemple, lorsqu’un processus de fabrication change, le dossier d’AMM doit être modifié, or ce changement peut prendre des mois, voire des années avant d’être validé par l’ensemble des pays concernés. Placer les médicaments anciens sous la coupe de l'Agence européenne du médicament, en harmonisant leurs AMM nationales, réglerait en partie le problème.
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