Alors que la France est le seul pays à contre-indiquer l’utilisation des AINS, et en particulier de l’ibuprofène, dans le Covid-19, les centres de pharmacovigilance de Tours et de Marseille viennent appuyer ses recommandations. En opposition avec les prises de position des agences du médicament américaine et européenne, ou encore de l’Organisation mondiale de la Santé.
Pour les centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) de Tours et de Marseille, la recommandation de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) d'éviter la prise d'ibuprofène pour traiter les symptômes de Covid-19 doit être prise au sérieux. Dans un long article paru vendredi, « Le Quotidien du Médecin » fait état d’une série de 39 cas de Covid grave relevés par les deux CRPV chez des patients relativement jeunes (âge médian de 55 ans) sans facteur de risque et dont la gravité de la maladie pourrait être attribuée à la prise d’AINS.
Sur ces 39 cas, 5 sont décédés, le pronostic vital a été engagé pour 14 patients et 24 ont été hospitalisés. Tous ont souffert de symptômes respiratoires aigus au cours du traitement par AINS (de l’ibuprofène dans 59 % des cas). Les CRPV notent en particulier que les 17 patients ayant développé une pneumonie avec insuffisance respiratoire aiguë sont plus jeunes et présentent moins de comorbidités (41 % versus 79 %) que dans la population globale des patients admis en réanimation pour Covid sur la même période, et ils font davantage d’épisodes de syndrome de détresse respiratoire aigu (88 % vs 35 %). Ce qui « suggère que l’exposition à un AINS à la phase précoce de l’infection à SARS-CoV-2 pour des symptômes aspécifiques a pu contribuer à développer une forme grave ».
Les risques associés aux AINS ne sont pas nouveaux. Joëlle Micallef, présidente du réseau français d’addictovigilance, rappelle qu’un rapport de pharmacovigilance de 2019 alertait déjà sur le risque d’aggravation des infections bactériennes à la suite de prise ponctuelle d’AINS, et notamment d’ibuprofène. Un risque investigué chez l’homme après des observations faites chez l’animal. « Si on inocule un pneumocoque chez le singe et qu’on le traite par ibuprofène, la pathologie flambe. C’est dans ce cadre que nous avons exploré l’effet de cette classe médicamenteuse sur les infections à SARS-CoV-2 », indique le Pr Micallef.
« Le Quotidien du Médecin » rappelle que les alertes de pharmacovigilance de la France n’ont pas eu de prises réelles à l’étranger. Saisie par l’ANSM, l’EMA a conclu en avril dernier à l’ajout dans les notices d’un risque de masquage des symptômes avec l’ibuprofène et le kétoprofène mais a rejeté le risque d’altérations des défenses immunitaires. Plusieurs études de cohorte menées au Danemark, aux États-Unis ou en Corée du Sud parues entre juin et septembre 2020 semblent plutôt écarter ce risque. Mais pour Joëlle Micallef, elles ne répondent pas à la question d’un point de vue médical. « Les auteurs ont regardé les délivrances jusqu'à un mois avant le déclenchement de la maladie. Cela ne nous renseigne pas sur le risque associé à une prise ponctuelle en phase aiguë. De plus, les patients ne sont décrits que sur une base microbiologique, on ne sait pas quels symptômes ils ont présentés. » Elle rejette aussi la mortalité comme critère de jugement principal, compte tenu de la petite taille des échantillons.
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