MÉDECINS, pharmaciens, infirmiers et patients viennent de rédiger à Bordeaux, la première charte de l’automédication. Objectif : encadrer un phénomène devenu incontournable, par des conseils de professionnels, pour en limiter les éventuels dangers. Le marché en plein essor des médicaments sans ordonnance représente près de 2 milliards d’euros et n’est pas sans risques : surdosages, surconsommation, accidents… C’est pour les limiter que les médecins libéraux d’Aquitaine (URPS-ML) ont initié la première charte française de l’automédication. Une démarche basée sur un principe simple : « l’automédication est incontournable. Œuvrons pour qu’elle soit responsable et sécurisée. » Présentée au public, le 26 novembre à Bordeaux, dans le cadre de la « semaine de la sécurité du patient », cette charte rappelle les grands principes d’une automédication sûre et responsable, apporte des conseils pratiques au patient et lui suggère une pharmacie familiale de base.
Concertation interprofessionnelle.
Unique en France, cette charte est d’abord une œuvre collective. Sous l’impulsion des médecins libéraux, sa rédaction a réuni autour d’une même table : l’URPS pharmaciens, l’URPS infirmiers, l’agence régionale de santé d’Aquitaine, l’Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique (OMEDIT), le Collectif Inter associatif sur la santé d’Aquitaine (CISS Aquitaine) et l’Association des malades et opérés cardiaques de la Gironde. « Nous avons travaillé au service du patient, dans une ambiance sympathique, sans esprit corporatiste, avec beaucoup de respect, précise Bernard Capdeville, qui a participé aux travaux au nom de l’URPS des pharmaciens. C’est une première démarche, équilibrée et réaliste, pour que les gens gardent confiance dans leur médecin et leur pharmacien et écoutent leurs mises en garde. Car, dans cette affaire, nous nous trouvons face à la schizophrénie des pouvoirs publics, qui poussent à l’automédication par les déremboursements ou en favorisant la publicité outrancière du médicament sur tous les grands supports, y compris Internet. C’est une tendance lourde qui ne date pas du gouvernement actuel, mais qui remonte aux années mille neuf cent quatre-vingt-dix. Nous sommes inquiets des surconsommations de médicaments pris à doses maximales, qui entraînent des accidents thérapeutiques. »
Face à ces risques, la Charte établit quelques règles d’or de l’automédication : se limiter à des médicaments conseillés par le médecin ou le pharmacien, privilégier la prise d’un seul médicament sur une courte durée, ne jamais se procurer de médicament sur Internet… Elle précise le rôle du médecin, du pharmacien et de l’infirmière à domicile. « Le pharmacien est une sentinelle qui doit parfois dire « ça suffit » pour que le médecin ne récupère pas 20 % d’iatrogénie, souligne Bernard Capdeville. Un phénomène qui demeure encore largement imputable au mésusage du médicament par les personnes âgées. »
La charte propose enfin une dizaine de références simples (paracétamol, arnica, lopéramide, sédatif à base de plantes, antiseptique non iodé…) permettant de construire une pharmacie familiale sans risque.
Dans les semaines qui viennent, la charte de l’automédication sera placardée sous forme d’affichette, dans des milliers de cabinets médicaux, d’officines et d’établissements de soins privés et publics d’Aquitaine. « Et au-delà, si d’autres professionnels de santé souhaitent la diffuser », indique-t-on à l’URPS-ML.
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