Les principales classes concernées sont les psychotropes, anticancéreux, anti-inflammatoires, antalgiques, anticoagulants, antidiabétiques, antiépileptiques, antirétroviraux et les médicaments cardiovasculaires. L’éducation thérapeutique, à chaque fois qu’elle est possible, joue un rôle très important en ce qu’elle vise à l’autonomisation du patient. Les entretiens pharmaceutiques s’inscrivent bien entendu dans cette démarche et au quotidien on ne saurait trop souligner le rôle du dossier pharmaceutique.
Enfin, chaque renouvellement d’un traitement chronique représente l’opportunité pour l’équipe officinale d’un rapide questionnement du patient sur son ressenti global, sur les effets indésirables et sur les éventuelles difficultés à suivre son traitement.
Précautions et mesures d’ordre général
L’accompagnement du pharmacien doit prendre en compte de multiples facteurs, susceptibles d’évoluer dans le temps, parmi lesquels, l’âge, les co-morbidités, le suivi du poids, l’apparition ou l’aggravation d’une insuffisance rénale ou hépatique (quid d’une nécessaire adaptation posologique ?), une modification de l’efficacité du traitement et la survenue d’effets indésirables (où leur variation).
Concernant ces derniers, il est important, sans inquiéter inutilement le patient, que celui-ci connaisse les plus fréquents, sache les détecter, si possible les prévenir et dans tous les cas savoir quelle attitude adopter.
Sans oublier d’insister auprès de lui sur l’importance de respecter strictement l’éventuel suivi biologique prescrit par le médecin.
Quelques classes à risque
- Chimiothérapies anticancéreuses :
Effets indésirables fréquents : nausées/vomissements, lésions buccales, atteintes des lignées sanguines, alopécie, manifestations cutanées et syndrome main-pied, sensations de fourmillements dans les membres (neuropathie).
Prévention/prise en charge : bains de bouche (bicarbonate…) systématiques après chaque repas contre les mucites et stomatites (si lésions mycosiques buccales : Mycostatine, amphotéricine B-Fungizone, fluconazole-Triflucan…) ; lopéramide ou argile (Smecta) en cas de diarrhée ; contre les nausées/vomissements, prises itératives de métoclopramide-Primpéran ou de métopimazine-Vogalène, voire d’une benzodiazépine anxiolytique ; une neutropénie peut indiquer une antibiothérapie (une neutropénie non fébrile requiert seulement une surveillance quotidienne, avec ou sans administration de facteur de croissance), tandis qu’une anémie (hémoglobine limite : 8 g/dl) sera combattue par des transfusions ou de l’érythropoïétine et la thrombopénie (seuil limite : 25 000/mm3) par l’administration de concentrés plaquettaires ou d’un facteur de croissance (romiplostim-NPlate, eltrombopag-Révolade). Les effets indésirables des thérapies ciblées orales sont surtout représentés par de la fatigue, des troubles gastro-intestinaux, une hyperkératose, des éruptions cutanées (notamment à type d’acné), un syndrome main-pied (éviter les traumatismes, utiliser des émollients), une hypertension artérielle, un retard à la cicatrisation des plaies (importance de porter des gants pour bricoler et jardiner) et des poussées hypertensives (importance de l’auto-surveillance).
- Morphiniques :
Effets indésirables fréquents : nausées/vomissements, constipation (pouvant être sévère), prurit, euphorie, somnolence (signe de surdosage), dépression respiratoire, spasmes des voies biliaires, hallucinations (surtout chez les sujets âgés). Certains d’entre eux régressent avec le temps, mais d’autres non, comme la constipation.
Prévention/prise en charge : métoclopramide-Primpéran, dropéridol-Droleptan, sétrons, spasmolytique, laxatif à instituer systématiquement (osmotique en première intention ; en deuxième naloxégol-Moventig, actif par voie orale ou méthylnaltrexone-Rélistor, par voie sous-cutanée).
- Psychotropes :
Effets indésirables fréquents : les classiques troubles de la vigilance (attention à la conduite automobile) ne sont pas les seuls. De fait, les antipsychotiques exposent à des troubles métaboliques, à une prise de poids (parfois considérable ; possible aussi avec les antidépresseurs et les antiépileptiques), à des troubles moteurs extrapyramidaux, à une dysfonction sexuelle et à une possible cardiotoxicité (allongement de l’intervalle QT et risque de torsades de pointe).
Prévention/prise en charge : surveillance régulière comprenant le poids (une augmentation d’au moins 5 % au cours du premier mois de traitement est un facteur prédictif d’une prise plus importante à plus long terme), le tour de taille, le bilan lipidique, la glycémie (risque de diabète), la tension artérielle. Les antiparkinsoniens anticholinergiques (trihexyphénidyle-Artane et Parkinane, bipéridène-Akinéton, tropatépine-Lepticur) sont parfois utilisés comme correcteurs des effets indésirables extrapyramidaux/syndrome parkinsonien.
- Antirétroviraux :
Effets indésirables : les médicaments actuellement utilisés sont globalement bien tolérés. Sur le long terme, la vigilance s’impose néanmoins au regard de l’état rénal et d’une possible accélération de l’athéromatose ainsi que de l’ostéopénie puis de l’ostéoporose.
Prévention/prise en charge : bilans réguliers (rénal, cardiovasculaire, ostéodensitométrie…).
- Anticoagulants oraux :
Effets indésirables fréquents : le principal est bien entendu représenté par les hémorragies et l’anémie. Sans méconnaître qu’un défaut d’observance expose au contraire à un risque grave de thrombose.
Prévention/prise en charge : une adaptation posologique des anticoagulants d’action directe est nécessaire en cas d’insuffisance rénale. L’attention du patient doit être attirée et rappelée aussi souvent que possible sur l’importance clé de la valeur cible de l’INR (le plus souvent entre 2 et 3) dans le suivi d’un traitement par antivitamines K. Attention au risque d’interactions médicamenteuses concernant les antivitamines K, y compris en ce qui concerne l’automédication.
Tous les anticoagulants oraux directs sont des substrats de la P-gp et sont donc soumis de ce fait à d’éventuelles interactions médicamenteuses. Les « xabans » ont un métabolisme dépendant du CYP3A4 (ce qui n’est pas le cas du dabigatran).
- Hypoglycémiants :
Effets indésirables fréquents : il s’agit essentiellement de l’hypoglycémie, mais pas seulement. En effet, la metformine peut occasionner des troubles digestifs (ballonnements, diarrhées, nausées), une acidose lactique étant potentiellement très grave, mais heureusement très rare. Mentionnons également l’habituelle prise de poids sous insulinothérapie, surtout dans le diabète de type 2.
Prévention/prise en charge : prise de metformine au cours ou en fin de repas, attention à l’insuffisance rénale ; en cas de déshydratation suite à une diarrhée ou des vomissements importants, fièvre… un arrêt temporaire du traitement doit être envisagé ; une autre circonstance peut favoriser l’acidose lactique chez le diabétique : la consommation excessive d’alcool, surtout à jeun. Le risque d’hypoglycémie avec les sulfamides et les glinides est encore plus fréquent chez les sujets âgés, en cas d’insuffisance rénale, ou de prise importante d’alcool.
- Antiasthmatiques :
Effets indésirables fréquents : les bêta-2 agonistes (surtout de courte durée d’action), peuvent induire une tachycardie et des tremblements et les anticholinergiques une sécheresse buccale et/ou une irritation laryngée. Les corticoïdes inhalés, quant à eux, peuvent entraîner une raucité de la voix et exposent au risque de survenue de candidose buccale.
Prévention/prise en charge : bien expliquer la différence entre le traitement de la crise d’asthme et le traitement de fond ; souligner l’importance de la corticothérapie inhalée au long cours (et conseiller de se rincer la bouche après chaque inhalation) ; s’assurer de la maîtrise des dispositifs d’administration et en cas de problèmes récurrents suggérer le recours à des formes poudres. S’assurer que le patient connaît les signes d’une exacerbation et sait quoi faire en pareil cas.
Article suivant
Quand le courant passe entre patient et pharmacien
Comment gérer les effets indésirables des traitements au long cours
Quand le courant passe entre patient et pharmacien
Questions de patience
L'indispensable carnet de vaccination du diabétique
Le digital au cœur de la relation patient - soignant
Quand la fatigue chronique s'invite au comptoir
Prescriptions au long cours
Fidèles outils de l’observance
Sport sur ordonnance, pour mieux vivre sa maladie
Le Covid-19, nouvelle maladie chronique ?