L’efficacité du traitement antifongique est conditionnée par quatre paramètres : 1) Choix de la molécule active : spectre et puissance fongicide (terbinafine par exemple) ou fongistatique (imidazoles par exemple) ; 2) Choix d’une présentation galénique appropriée ; 3) Rigueur dans l’observance ; 4) Application de mesures d’hygiène élémentaires.
Choix de la molécule antifongique.
Les antifongiques sont regroupés en deux catégories :
- Antifongiques à spectre large. Ils sont actifs sur les candidas et le pityriasis, les dermatophytes (voire même sur certaines bactéries Gram +) : imidazoles, allylamines (terbinafine = Lamisil ou Lamisilate ; amorolfine = Curanail, Locéryl), ciclopirox (Miconail, Mycoster, Onytec).
- Antifongiques à spectre étroit. Acide undécylénique (Mycodécyl), tolnaftate (Sporiline) et griséofulvine (Griséfuline) sont des antidermatophytiques ; nystatine (Mycostatine) et amphotéricine B (Fungizone) sont des polyènes anticandidosiques.
La majorité des antifongiques sont formulés avec un principe actif unique. Il existe cependant quelques associations avec des antibactériens (Polygynax ovule : néomycine, polymyxine et nystatine) ou avec un corticoïde (Pévisone : éconazole + triamcinolone).
› Imidazoles. Ces antifongiques inhibent la synthèse de l’ergostérol de la membrane cytoplasmique fongique. Leur pénétration dans la couche cornée est satisfaisante ; certaines molécules y restent actives plusieurs jours. Les applications sont quotidiennes pendant deux à quatre semaines (voire six). La résistance demeure rare.
Les imidazoles s’utilisent par voie générale dans le traitement des lésions extensives multiples et dans celui des mycoses viscérales et profondes (non évoquées ici), mais aussi, s’agissant des infections cutanéomuqueuses, en cas de résistance ou chez le sujet immunodéprimé (itraconazole = Sporanox ; posaconazole = Noxafil).
› Polyènes. Ce groupe comprend la nystatine (Mycostatine), trop toxique pour un usage systémique, et l’amphotéricine B (Fungizone, solution buvable ou injectable). Ces inhibiteurs de la synthèse de la paroi des fungi sont peu actifs sur les dermatophytes. Ils ne sont pas résorbés à travers la peau ou la muqueuse, d’où leur intérêt sur les mycoses superficielles. L’amphotéricine en solution buvable est indiquée dans le traitement des candidoses buccales (bain de bouche) ou digestives (per os, avec action topique sur la muqueuse digestive).
› Allylamines. Ces inhibiteurs de la synthèse des stérols membranaires comptent au nombre des plus prescrits actuellement dans le traitement des dermatophytoses.
- La terbinafine (Lamisil, Lamisilate), disponible sous forme topique et sous forme orale a une action fongicide. Elle est inactive sur le pityriasis et sur les candidoses vaginales mais sa diffusion dans la tablette unguéale autorise le traitement systémique d’une onychomycose.
- L’amorolfine (Curanail, Locéryl) est disponible sous forme de vernis unguéal.
› Griséofulvine. Cet antibiotique fongistatique, inhibiteur de la mitose, est indiqué dans le traitement systémique des mycoses à dermatophytes des cheveux, de la peau et des ongles (Griséfuline : 1 g/j chez l’adulte et 10 à 20 mg/kg chez l’enfant, sur deux à trois semaines). Son administration expose à des effets indésirables neurologiques (céphalées, vertiges), à des réactions cutanées et de photosensibilisation, à des troubles hématologiques impliquant de surveiller l’hémogramme si le traitement se prolonge plus d’un mois.
› Antifongiques topiques divers.
- L’acide undécylénique (Mycodécyl) constitue un traitement d’appoint des dermatophyties (notamment dans leurs localisations plantaires), du fait de l’action fongistatique de cet acide gras. Son utilisation en monothérapie donne des résultats inconstants et des récidives fréquentes.
- Le ciclopirox est décliné sous forme topique (Mycoster) et sous forme d’un vernis unguéal (Miconail, Onytec) constituant un traitement des onychomycoses sans atteinte matricielle.
- Le tolnaftate (Sporiline) a un spectre est étroit, englobant les dermatophytes et la pityrosporose. Il reste inactif sur les candidoses.
- Il ne faut pas négliger l’intérêt des antiseptiques, parmi lesquels : les dérivés iodés, utilisés dans le traitement des mycoses superficielles (Bétadine) ou le sulfure de sélénium (Selsun), indiqué dans la pityrosporose et la dermatite séborrhéique du cuir chevelu mais exposant à un risque d’irritation locale.
- Les bains de bouche de bicarbonate sodique sont administrés en traitement ou prévention des candidoses buccales.
- Les solutions de permanganate de potassium ont un rôle oxydant et asséchant des zones infectées et sont parfois prescrites dans le traitement des mycoses.
Choix de la galénique.
Les formes topiques classiques sont peu ou pas actives lorsque la mycose affecte les ongles (onychomycoses) ou les poils (teigne), ce qui explique la multiplicité des présentations galéniques : crème (lésions cutanées, intertrigos inclus, et muqueuses), poudre (intertrigo, traitement des chaussures), spray solution (zones pileuses, cuir chevelu), gel (lésions cutanées et muqueuses), émulsion (mycose des peaux sensibles), solution filmogène, vernis ou pommade type Amycor Onychoset (onychomycose), shampoing (Sébiprox).
Leur efficacité dépend de la nature et de la localisation de la mycose et de la molécule choisie, mais elle dépend également de la viscosité, de la polarité et du pH de la formulation. Les crèmes sont adaptées aux lésions cutanées sèches et desquamatives ; des lésions suintantes et macérées font privilégier émulsions ou gels, voire poudre. L’élimination préalable des couches kératinisées peu perméables, lorsqu’elle est possible, constitue un atout dans la réussite du traitement.
Le passage transcutané ou transmuqueux des formes locales reste limité (‹2% de la dose appliquée) : il n’y a qu’exceptionnellement d’effets indésirables systémiques, du moins si le topique n’est pas appliqué sur une peau lésée, sur une trop grande surface ou chez un nourrisson (rapport surface/poids corporel réduit, effet occlusif des couches). Les effets indésirables les plus fréquemment retrouvés sont un érythème localisé, une sensation de brûlure et/ou un prurit.
Le recours à une forme systémique s’impose face à certaines mycoses superficielles, soit en raison du terrain (patient immunodéprimé), soit en raison d’une insuffisante pénétration locale du principe actif.
Règles d’hygiène.
Les mycoses cutanéomuqueuses sont favorisées par la macération, l’humidité, la prise de médicaments (antibiotiques notamment). Le respect de règles d’hygiène simples en limite le risque de survenue :
- Privilégier le port de sous-vêtements en coton et en changer quotidiennement ;
- Laver les sous-vêtements, les draps et les serviettes à 60 °C ;
- Ne pas partager ses chaussettes et ne pas partager de serviettes de toilette ;
- Éviter les vêtements serrés ;
- Ne pas garder sur soi un maillot de bain mouillé ;
- Ne pas porter quotidiennement des chaussures favorisant la macération (chaussures de sport notamment) : préférer des modèles aérés (en particulier pour les chaussures de protection professionnelles) ; traiter quotidiennement si besoin chaussettes, bas, chaussures et pantoufles avec un spray désodorisant et fongistatique spécifique ou un antifongique en poudre ;
- Privilégier les douches aux bains et utiliser un savon acide dans les cas de dermatophytie mais neutre ou alcalin dans les cas de candidose ;
- Sécher soigneusement les plis cutanés après la toilette, avec une serviette propre voire, si besoin, avec un sèche-cheveux ;
- Utiliser des produits contre la transpiration excessive (hyperhydrose) ;
- Éviter la fréquentation répétée de lieux chauds et humides (bains bouillonnants, hammam, sauna, etc.), laver et désinfecter les tapis de bains et éviter de marcher pieds nus chez soi.
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3 questions à…
Françoise Amouroux
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