Les rechutes étant liées à des facteurs nombreux (environnement social, conditions de travail si le patient exerce une activité professionnelle, pression du groupe, persistance du besoin irrépressible de boire ou « craving »), les médicaments spécifiques du post-sevrage, pour utiles qu’ils soient, ne peuvent suffire. Les antidépresseurs, prescrits sur une durée de plusieurs mois, sont indispensables si les signes dépressifs persistent au terme du sevrage : ils limitent les récidives précoces ou un risque de suicide. D’autres traitements psychoactifs (antipsychotiques, normothymiques, anxiolytiques) ont fait l’objet d’évaluation montrant leur intérêt pour des groupes de patients précis.
Disulfirame.
Certains médicaments (antibiotiques et antifongiques notamment), en bloquant une enzyme indispensable au métabolisme de l’alcool (l’acétaldéhyde déshydrogénase) provoquent lors de leur ingestion une réaction désagréable, se traduisant par une rougeur faciale (effet de flush lié à une brutale vasodilatation), des céphalées, des sueurs abondantes, des nausées voire des vomissements, une accélération du rythme cardiaque. Cet effet, dit « antabuse » (néologisme : anti-abus), contre-indiquant l’usage d’alcool, est particulièrement important avec le disulfirame (Espéral) qui peut donc induire une aversion à l’égard de l’alcool et constitue une incitation pour un patient volontaire à demeurer abstinent.
Acamprosate.
L’acamprosate (Aotal), de structure proche de celle du GABA franchit la barrière hémato-encéphalique. Il potentialise la transmission GABAergique : le sevrage démasque une hypoactivité GABAergique que ce médicament concoure à normaliser. L’acamprosate diminue le besoin de boire (craving) qui demeure généralement impérieux chez le patient sevré : dénué d’effet aversif, il n’a aucune action de substitution de l’alcool et contribue seulement à faciliter le maintien de l’abstinence. Son administration, pendant au moins un an, est associée à un accompagnement psychologique et parfois social. Une réalcoolisation périodique ne remet pas en cause la pertinence du traitement et n’impose pas de le suspendre.
Naltrexone.
La naltrexone (Révia et génériques) est un antagoniste des opiacés initialement commercialisé dans l’aide au maintien de l’abstinence chez les ex-héroïnomanes (Nalorex). Elle bloque l’effet de renforcement induit par la sécrétion d’opiacés endogènes induite par l’alcoolisation au niveau du système limbique : la naltrexone n’a pas d’effet aversif. De ce fait, sa prescription concerne essentiellement les patients présentant une dépendance psychique à l’alcool, en association, avec un soutien psychologique.
Concrètement, l’administration de naltrexone à un patient sevré limite l’impériosité du besoin d’ingérer de l’alcool. Le taux de rechute est diminué, puisqu’il est réduit à 50 % au cours des trois premiers mois suivant le sevrage. En réduisant le plaisir ressentit en consommant de l’alcool, la naltrexone constitue une prévention secondaire des rechutes qui sont vécues comme moins « gratifiantes ».
Baclofène.
Les médias ont abondamment rapporté les expériences de maintien de l’abstinence grâce à un agoniste du récepteur GABAB, le baclofène (Liorésal et génériques), un myorelaxant faiblement antinociceptif et anxiolytique. Des résultats encourageants ont été obtenus sur de petites séries de patients, avec des posologies variables (30 à 270 mg/j), et la tolérance du traitement est satisfaisante. Les données restent donc réduites : en particulier, il n’existe pas d’essai multicentrique montrant l’efficacité de ce traitement.
Quelques études font également état d’une efficacité du baclofène pour réduire les signes cliniques observés lors du sevrage, sans que son intérêt par rapport au diazépam soit démontré.
La prescription de ce médicament hors AMM se fait bien entendu aux risques et périls du médecin, quand bien même il a pu recueillir le consentement du patient.
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