La prise en charge du DT2, devenue particulièrement complexe, est l’objet de controverses nombreuses, eut égard au nombre croissant de médicaments disponibles. Le consensus publié conjointement en 2012 par deux sociétés de diabétologie, l’une américaine (American Diabetes Association ou ADA) et l’autre européenne (European Association for the Study of Diabetes ou EASD) présente l’intérêt de positionner toutes les classes d’antidiabétiques actuellement commercialisées.
À un algorithme de décision, trop coercitif dans le cadre du diabète, pathologie évolutive et spécifique à chaque patient se substitue une stratégie centrée sur le malade, prenant en compte ses difficultés à suivre le traitement, à le comprendre, et à respecter les règles hygiénodiététiques minimales.
Le suivi repose sur le dosage trimestriel de l’HbA1c, reflet de la glycémie des trois mois précédents ; s’y associent le contrôle de la tension artérielle, du poids et l’évaluation de l’observance. Un bilan annuel inclut un fond d’œil, une créatininémie, une microalbuminurie des 24 heures, l’examen des pieds, un bilan lipidique et un électrocardiogramme.
Objectifs du traitement.
La cible glycémique la plus basse sera privilégiée si elle peut être obtenue avec une stratégie peu complexe limitant la iatrogénie.
L’ADA préconise de diminuer l’HbA1c à moins de 7 % chez la plupart des patients, de façon à réduire l’incidence des lésions microvasculaires : ceci correspond à une glycémie comprise entre 8,3 et 8,9 mmol/L (1,5 à 1,6 g/L). La glycémie à jeun et pré-prandiale devrait idéalement être maintenue ‹ 7,2 mmol/L et la glycémie postprandiale ‹ 10 mmol/L. Des cibles plus basses telles une HbA1c à 6 % ou 6,5 % peuvent être indiquées chez des patients pour lesquels l’espérance de vie est longue et/ou ne présentant pas de pathologie cardiovasculaire, si cette cible peut être atteinte sans hypoglycémie significative ou iatrogénie particulière. Inversement, une cible moins ambitieuse, telle une HbA1c comprise entre 7,5 et 8 %, pourra constituer le seul objectif réaliste chez des patients dont l’espérance de vie est limitée, présentant de nombreuses comorbidités, peu autonomes, mal contrôlées malgré une polythérapie antidiabétique ou ne satisfaisant pas aux règles hygiénodiététiques minimales.
Il importe cependant toujours d’assurer un contrôle précoce de l’équilibre glycémique, plus efficace dans la prévention des complications à long terme du diabète.
Traitement de première intention.
En l’absence de contre-indications, la metformine est prescrite rapidement après le diagnostic, sitôt qu’il est constaté que les interventions sur le style de vie ne donnent pas d’effets. Ce traitement est débuté à faible dose en raison de ses effets digestifs transitoires.
Lorsque le taux d’HbA1c de base est élevé (› 9%), il peut être justifié de prescrire en première intention une bithérapie, susceptible si besoin d’inclure de l’insuline. L’administration d’insuline est incontournable lorsque le taux initial d’HbA1c est compris entre 10 et 12 %, et ce particulièrement en cas de cétonurie (reflet d’une insulinopénie sévère). Une fois les symptômes initiaux corrigés, il est possible de supprimer l’insuline pour revenir à une association d’antidiabétiques d’autres familles.
La monothérapie de première intention peut, si besoin, reposer sur la prescription d’un sulfamide hypoglycémiant, d’un glinide, d’un inhibiteur de la DPP-4 ou d’un agoniste GLP-1 lorsqu’il est impératif de favoriser une perte de poids.
Ce traitement impose l’évaluation de la fonction rénale : ne pas administrer de metformine si Clcréa ‹ 60 ml/min, de sulfamides ou d’incrétinomimétiques si elle est ‹ 30 ml/min et réduire par deux la dose de gliptines en deçà de 50 ml/min.
Passage à une bithérapie.
Lorsque la monothérapie initiale ne permet pas d’atteindre la cible dans les trois mois, il est possible d’ajouter un autre antidiabétique par voie orale, un agoniste GLP-1 voire une insuline basale. L’adjonction de ce deuxième médicament fait espérer une réduction du taux d’HbA1c de 1 %. Le choix du deuxième médicament repose sur sa balance bénéfice-risque propre : il n’y a pas de consensus et peu d’essais publiés. Si la bithérapie ne donne pas le résultat escompté, il est nécessaire de faire l’essai d’une autre option en association.
Dans tous les cas, éviter ou limiter au maximum la prise de poids et prendre en compte la tolérance du traitement : le risque de fracture peut faire problème chez une femme ménopausée, la rétention hydrique peut poser un problème esthétique chez un patient jeune, les effets indésirables digestifs peuvent être handicapants chez d’autres patients encore.
Passage à la trithérapie.
Si la bithérapie n’est pas - ou n’est plus - efficace pour atteindre et maintenir la cible glycémique, il peut être intéressant d’introduire un troisième antidiabétique, souvent alors l’insuline qui, seule, supplée à la perte de fonction bêta du pancréas. L’important reste avant tout d’éviter des périodes prolongées sans contrôle suffisant de l’hyperglycémie. Les médicaments prescrits ont alors des actions complémentaires
Insulinothérapie. L’insulinothérapie est initiée à dose faible (ex : 0,1 à 0,2 u/kg/j, parfois 0,3 à 0,4 u/kg/j si la glycémie est très élevée). La stratégie privilégiée est celle d’une injection quotidienne d’une insuline basale. Il est possible de maintenir le traitement par metformine, ce qui aurait l’avantage de limiter la prise de poids. Il est possible de poursuivre aussi l’administration d’un sécrétagogue insulinique (sulfamide, glinide).
Une insuline prandiale est introduite dès que l’incursion glycémique postprandiale excède 10mmol/L (1,80 g/L), particulièrement lorsque la glycémie à jeun satisfait à l’objectif fixé, mais que le taux d’HbA1c reste élevé malgré trois à six mois de titration de l’insuline basale ou encore lorsque la glycémie s’effondre pendant la nuit ou à distance des repas. Le maintien de la prescription d’un sécrétagogue n’est plus justifié une fois l’insuline prandiale introduite dans le schéma thérapeutique. Des études encore lacunaires suggèrent d’associer un traitement par incrétinomimétique ou agoniste DPP-4.
L’ADA et l’EASD soulignent des points fondamentaux quant au traitement par insuline :
› Toute insuline abaisse la glycémie et le taux d’HbA1c ;
› Les insulines sont associées à un faible risque de prise de poids et à un certain risque d’hypoglycémie ;
› Plus les doses d’insuline sont fortes, plus la titration est agressive, plus la diminution du taux d’HbA1C est importante, mais au prix d’un risque iatrogène accru ;
› Les analogues lents de l’insuline réduisent l’incidence des hypoglycémies nocturnes, et les analogues rapides réduisent les excursions des glycémies post-prandiales par rapport aux insulines humaines correspondantes (NPH, insuline ordinaire), mais les analogues ne sont généralement pas associés à une réduction significative du taux d’HbA1c.
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