L’hyperactivité sécrétoire de la thyroïde entraîne un syndrome de thyrotoxicose. Il existe des formes asymptomatiques ou frustes et des formes avérées, accompagnées de signes cliniques francs cardiaques et/ou neuropsychiques préoccupants. L’hyperthyroïdie est fréquente puisqu’elle affecte entre 1 % et 2 % de la population générale. Elle prédomine largement chez les femmes avec un sex-ratio de 1 pour 8.Étiologies. Les principales causes d’hyperthyroïdie de l’adulte sont la maladie de Basedow (maladie auto-immune touchant essentiellement la femme entre 20 et 40 ans ; cause d’hyperthyroïdie la plus fréquente, elle explique environ 60 % des cas), le goitre multinodulaire, l’adénome toxique, une iatrogénie induite notamment par une surcharge iodée ou par l’amiodarone, un traitement par interféron, une automédication par hormone thyroïdienne utilisée pour maigrir, etc. Les nombreuses autres causes d’hyperthyroïdies ne sont à l’origine que de cas rares voire exceptionnels et ne sont pas évoquées plus ici.Si l’expression clinique d’une hyperthyroïdie est variable, certains signes fonctionnels font évoquer un syndrome de thyrotoxicose : des troubles cardiaques (tachycardie régulière exagérée à l’effort ou aux émotions, persistant au repos, troubles du rythme dont fibrillation auriculaire, augmentation de l’intensité des bruits du cœur déterminant l’éréthisme cardiaque), amaigrissement avec appétit conservé voire augmenté, asthénie, thermophobie, polydipsie, hypersudation, instabilité émotionnelle (nervosité, irritabilité, émotivité, agitation), tremblement fin des extrémités, amyotrophie prédominant aux racines des membres, accélération du transit intestinal, gynécomastie chez l’homme et dysménorrhée chez la femme sans altération de la fécondité. En l’absence de traitement, ces signes peuvent se compliquer notamment au plan cardiologique (trouble du rythme, insuffisance cardiaque).L’orbitopathie observée dans la maladie de Basedow traduit une réaction inflammatoire affectant les muscles orbitaires et la graisse rétro-orbitaire. Caractéristique, cette atteinte de l’œil et de ses annexes induit une hyperhémie conjonctivale avec photophobie, exophtalmie, œdème palpébral. Elle est susceptible de mettre en péril le pronostic visuel par compression du nerf ophtalmique. La survenue d’un myxœdème prétibial, se traduisant par un placard rouge, surélevé, induré, sur la face antérieure des jambes et des chevilles, est également spécifique de la maladie de Basedow et a même origine que l’orbitopathie.La crise aiguë thyrotoxique avec fièvre élevée, déshydratation et troubles cardiovasculaires, susceptible de mettre en jeu le pronostic vital, est exceptionnelle.Examens biologiques. En première intention, le dosage de la TSH est nécessaire et suffisant.- Des signes cliniques patents accompagnés d’un taux de TSH effondré et de taux d’hormones T4 et T3 libres augmentés signent une hyperthyroïdie franche.- Des signes cliniques discrets ou absents, un taux de TSH inférieur à la normale et des taux de T4 et de T3 normaux signent une hyperthyroïdie fruste.- Un taux de TSH normal écarte le diagnostic d’hyperthyroïdie, sauf s’il existe des arguments cliniques en faveur d’une thyrotoxicose (dans ce cas, une augmentation du taux de T4 libre signe une hyperthyroïdie d’origine centrale ou un syndrome de résistance aux hormones thyroïdiennes).- Un taux de TSH élevé accompagné d’un taux de T4 libre élevé fait évoquer, face à des arguments cliniques forts, la possibilité d’une hyperthyroïdie centrale ou d’un syndrome de résistance aux hormones thyroïdiennes.La prise en charge. Une hyperthyroïdie impose généralement l’administration d’un antithyroïdien de synthèse (ATS), bloquant la production des hormones thyroïdiennes et actif en dix à quinze jours : carbimazole (Néo-Mercazole) et thiamazole (Thyrozol) sont administrés une fois par jour ; propylthio-uracile (Propylex) et benzylthiouracile (Basdène) le sont trois fois. L’ATS est prescrit à posologie forte pendant un à deux mois, puis en entretien sur 12 à 18 mois, soit en monothérapie à très faible dose, soit à dose forte mais en association à de la lévothyroxine. L’action des ATS est suspensive et les rechutes sont fréquentes à l’arrêt du traitement. Ces médicaments sont bien tolérés en général (risque de prurit, d’éruption cutanée, de syndrome pseudo-grippal) ; ils exposent aussi à la survenue précoce (dans les 3 premiers mois de traitement) d’une leuconeutropénie et d’une agranulocytose, rare (incidence < 1 %) mais préoccupante, avec un risque dose-dépendant - sa survenue contre-indique définitivement tout usage d’un ATS -. Soulignons aussi que le carbimazole et le thiamazole peuvent être à l’origine d’agueusie et de pancréatites aiguës d’origine immune, imposant l’arrêt immédiat du traitement et sa contre-indication définitive, ainsi que des malformations fœtales justifiant leur contre-indication durant la grossesse et imposant une contraception efficace chez la femme en âge de procréer. Le propylthio-uracile est quant à lui hépatotoxique, d’où une surveillance des enzymes hépatiques accompagnant celle de la NFS.Selon les cas, notamment face à une résistance aux ATS ou pour traiter un nodule toxique ou un goitre multinodulaire, l’hyperthyroïdie peut imposer un geste chirurgical (thyroïdectomie totale, subtotale, simple lobectomie) ou l’administration d’iode radioactif pour détruire partiellement la thyroïde. Ces techniques exposent à un risque d’hypothyroïdie précoce (chirurgie) ou tardive (iode chaud).Quelques points méritent d’être soulignés :- Les thyroïdites subaiguës d’origine virale (thyroïdite de De Quervain par exemple) ne sont pas traitées ou traitées par un anti-inflammatoire si les signes cliniques sont importants.- Les conséquences cardiaques d’une thyrotoxicose sont contrôlées par un bêta-bloquant non cardio-sélectif (type propranolol).- L’orbitopathie de la maladie de Basedow peut imposer un traitement ophtalmologique spécifique (corticothérapie massive, radiothérapie rétro-orbitaire, chirurgie de décompression) car elle répond mal au traitement anti-thyroïdien.La surveillance. La surveillance d’une hyperthyroïdie varie selon le traitement mis en œuvre. Pour nous en tenir ici aux deux cas principaux :- Une hyperthyroïdie infraclinique, avec diminution isolée du taux de TSH, nécessite un simple suivi biologique tous les six mois en cas d’abstention thérapeutique.- Un traitement par ATS impose après 3 à 5 semaines d’administration un dosage de la T4 ou de la T3 (s’il s’agit d’une hyperthyroïdie à T3) libres. L’euthyroïdie est affirmée par la normalisation du taux de l’hormone. Une fois obtenue une euthyroïdie stable, il est fréquent d’associer à l’ATS, en phase d’entretien, de la lévothyroxine pour prévenir une hypothyroïdie iatrogène induite par l’administration d’un ATS à dose forte et/ou constante. Il suffit de doser la TSH et la T4 libres tous les 3 à 4 mois pendant la durée du traitement, prescrit généralement sur 12 à 18 mois, avec diminution progressive des doses.Il faut suivre la numération-formule sanguine (NFS) ainsi que le taux de plaquettes. Cet examen sera réitéré tous les huit à dix jours pendant les deux premiers mois du traitement, puis à l’occasion de chaque contrôle de la fonction thyroïdienne. Un épisode fébrile impose une numération formule sanguine (NFS).Le dosage des anticorps antirécepteurs de la TSH permet d’anticiper une rechute : elle s’avère inéluctable ou presque s’ils demeurent élevés à l’issue du traitement.Une surveillance clinique et biologique annuelle est nécessaire durant les deux à trois ans faisant suite au traitement en raison du risque de récidive.
Les hyperthyroïdies
Publié le 01/06/2021
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Source : lequotidiendupharmacien.fr
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