RAPPELONS D’ABORD que le diabète est défini par une glycémie à jeun (jeûne d’au moins 8 heures) supérieure à 1,26 g/l (7 mmol/l) mesurée à deux reprises, ou à 2 g/l (11,1 mmol/l) à n’importe quel moment de la journée. Les « armes » fondamentales de la prise en charge ont pour noms, diététique, activité physique et éventuellement traitement médicamenteux et surveillance glycémique. En se souvenant qu’une fois « déclaré » le diabète est une pathologie foncièrement évolutive et que la dégradation avec le temps du contrôle glycémique est inéluctable, liée à une insulinopénie progressive, mais avec de grandes différences d’un patient à l’autre.
Hémoglobine glyquée : le juge de paix.
L’hémoglobine glyquée (HbA1c) est un marqueur rétrospectif de la qualité du contrôle glycémique dans les 2 mois qui précèdent le dosage. Dosée tous les 3 mois, elle permet de savoir si l’objectif est atteint. Les chiffres « théoriques » sont : moins de 6 % sous régime seul, moins de 6,5 % sous monothérapie, moins de 7 % sous bi ou trithérapie ou sous insuline et enfin, moins de 8 % chez les patients de plus de 75 ans présentant une ou plusieurs comorbidités.
Dans la pratique, les objectifs glycémiques, tout comme le choix du traitement médicamenteux, doivent être adaptés en fonction de l’âge, de l’ancienneté du diabète, du risque hypoglycémique et de situations particulières. Il est également utile de réaliser une glycémie à jeun une ou deux fois par an, notamment nécessaire chez les patients bénéficiant d’une autosurveillance glycémique afin de vérifier la qualité des glycémies capillaires réalisées.
Escalade thérapeutique programmée.
« Les mesures hygiénodiététiques demeurent la base du traitement initial, lorsque l’hémoglobine glyquée est inférieure à 6,5 % et la glycémie à jeun peu élevée », souligne le Pr Vexiau. « L’objectif est alors de maintenir celle-ci entre 6 % et 6,5 % », ajoute-t-il. Quand l’hémoglobine glyquée atteint durablement 6,5 %, la mise en route d’un traitement médicamenteux doit être discutée.
Côté principe actif, la metformine demeure le médicament de première intention, à des doses variant selon la tolérance (améliorée en cas de prise au cours ou à la fin du repas) et les résultats obtenus entre 1 000 et 3 000 mg par jour en deux ou trois prises. Les intolérances concerneraient environ 15 % des patients.
« Outre le fait de ne pas faire grossir et de ne pas induire d’hypoglycémie, elle présente l’avantage d’être bien connue, car elle dispose d’un recul d’emploi de plus de 50 ans, » précise le Pr Vexiau.
Rappelons les précautions d’emploi au regard d’une éventuelle insuffisance rénale (mesurée par la clairance à la créatinine) : diminution de la dose en deçà de 60 ml/mn et contre-indication en dessous de 30 ml/mn.
« Quand on dépasse 6,5 % d’hémoglobine glyquée, on peut passer à une bithérapie, associant la metformine à une autre classe d’antidiabétique » indique le Pr Vexiau. Aux produits cités dans les recommandations de 2007 (inhibiteurs des alphaglucosidases, insulinosécréteurs, glitazones) se sont ajoutés par la suite les inhibiteurs de la dipeptidyl-peptidase IV ou gliptines (actifs par voie orale en une ou deux prises par jour) et les agonistes du GLP-1, qui s’administrent par voie sous-cutanée à raison d’une ou deux injections par jour.
Rappelons à ce sujet que les inhibiteurs des alphaglucosidases intestinales ont une efficacité modérée sur le taux d’hémoglobine glyquée (0,5 %) et sont utilisés pour écrêter les pics glycémiques postprandiaux, alors que les autres hypoglycémiants diminuent, en moyenne, d’environ 1 % (parfois davantage, en fonction des valeurs initiales) l’hémoglobine glyquée.
Il ne faut pas oublier la nécessité d’une bonne observance, qui peut être obérée par des effets indésirables, au premier rang desquels l’hypoglycémie, particulièrement à redouter avec les sulfamides hypoglycémiants (ce qui remet en cause leur intérêt dans le cadre d’une augmentation posologique chez des patients proches de leur objectif).
Les apports des nouveaux produits.
« Les gliptines et les agonistes du GLP-1 sont efficaces, bien tolérés, avec néanmoins de possibles sensations de nausées transitoires en début de traitement, et n’exposent pas à un risque hypoglycémique, sauf s’ils sont associés à un sulfamide. De plus, ils entraînent parfois une perte de poids significative, ce qui est appréciable pour ces patients », précise le Pr Vexiau. Mais le recul de ces produits demeure réduit, de l’ordre de 3 ans pour les premiers mis sur le marché. Concernant les glitazones, rappelons le retrait du marché de la rosiglitazone et que le maintien de la pioglitazone (surrisque de cancer de la vessie ?) est suspendu aux résultats attendus d’études en cours.
L’échec de plusieurs bithérapies doit faire envisager une trithérapie. Enfin, l’heure de l’insulinothérapie (qui semble pouvoir être parfois retardée par l’addition d’un agoniste du GLP-1) ne doit pas être repoussée quand les autres traitements ont atteint leur limite. Mais, avec des délais très variables : si la moyenne se situe entre 10 et 15 ans, le besoin de l’insulinothérapie peut aussi survenir entre 2 à 5 ans.
Tenir compte des données récentes.
« Les résultats de grandes études récentes sont venus rappeler que le mieux est parfois l’ennemi du bien et qu’il peut y avoir un risque à vouloir obtenir à toute force un contrôle glycémique le plus parfait possible », constate le Pr Vexiau.
De fait, certaines études ont montré un surrisque cardiovasculaire, en termes de morbi-mortalité, chez des diabétiques ayant un contrôle glycémique très strict. Il est possible que celui-ci concerne tout particulièrement les patients faisant de nombreuses hypoglycémies, pouvant d’ailleurs passer éventuellement inaperçues si elles sont nocturnes et plus encore des patients avec de grandes fluctuations glycémiques et/ou un mauvais contrôle à l’inclusion de l’étude. « Quoi qu’il en soit, ces études ont quelque peu remis en cause les objectifs de contrôle métabolique chez certains patients. Il peut ainsi, par exemple, sembler peu souhaitable de chercher une hémoglobine glyquée à 6,5 % voire 6 %, chez un patient dont le diabète évolue depuis une quinzaine d’années et qui présente des comorbidités. Les spécificités des patients âgés doivent également être prises en compte ».
« Mais nous sommes dans l’attente des nouvelles recommandations de l’HAS qui devraient être publiées d’ici quelques mois », conclut le Pr Vexiau.
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