Toujours symptomatique, le traitement de la crise de migraine doit être instauré le plus précocement possible, dès l’apparition des céphalées.
Traitement antalgique.
La douleur répond à de nombreuses molécules, dont le choix sera adapté au terrain (âge, antécédents, traitements et pathologies associées).
- Le paracétamol reste insuffisamment évalué chez le patient migraineux en crise ; de plus, la prise de fortes doses expose à un risque d’hépatotoxicité.
- L’aspirine a une action inconstante portant uniquement sur les céphalées ;
- Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) sont efficaces. Il n’y a pas d’inefficacité croisée : en cas d’échec thérapeutique, il faut essayer un autre AINS jusqu’à trouver le médicament et la posologie adaptés. Cette prescription est logique car la migraine s’accompagne d’une inflammation des artères méningées et de l’extravasation de protéines plasmatiques algogènes. L’ibuprofène bénéficie d’une indication spécifique dans la crise de migraine (Advil, Spifène) ; le kétoprofène est disponible sous une spécialité dédiée au traitement de la crise de migraine (Profémigr 150 mg).
- Les opiacés (codéine, tramadol, morphine, etc.), seuls ou associés, doivent être évités en raison du risque d’abus médicamenteux et de leur tendance à augmenter les nausées ;
- La caféine, fréquemment associée aux antalgiques ou aux vasoconstricteurs ne peut être recommandée, d’autant que son usage peut devenir abusif.
Des gestes simples peuvent parfois avoir une efficacité remarquable : compression de la tempe du côté douloureux, application de compresses froides sur la tempe, ingestion de sucre, etc. Dans d’autres cas, il suffit que le patient reste allongé dans une pièce calme et obscure.
Traitement vasoconstricteur.
Des théories faisant résulter la migraine d’une vasodilatation localisée dans le cerveau, il est logique d’y répondre par des vasoconstricteurs comme les dérivés de l’ergot du seigle ou les triptans.
› Alcaloïdes de l’ergot. Ces alcaloïdes, agonistes sérotoninergiques, antagonistes dopaminergiques et antagonistes alpha-adrénergiques, induisent une vasoconstriction systémique prolongée. Ils ne sont efficaces qu’administrés précocement lors du début de la crise.
La dihydroergotamine (DHE) est indiquée dans le traitement de la crise (voie parentérale ou spray car la biodisponibilité orale est alors insuffisante : Dihydroergotamine Amdipharm, Diergospray) comme dans le traitement de fond de la migraine (cf. infra).
Les effets indésirables sont réduits si les administrations restent intermittentes. La voie orale peut induire des nausées et des vomissements (aggravant ceux de la migraine) si le médicament est pris à jeun. L’activité vasoconstrictrice des alcaloïdes de l’ergot peut être à l’origine de paresthésies des extrémités, de douleurs angineuses et d’un possible syndrome de Raynaud. Ces médicaments peuvent aussi induire œdèmes, myalgies et arthralgies, rashs cutanés, urticaire. Utilisés sur une période prolongée, ils exposent à de rares cas de fibrose cardiothoracique (plèvre, espace péritonéal). Dans sa séance du 15 décembre 2011, la commission d’AMM de l’Afssaps a conclu à un rapport bénéfice/risque défavorable pour les médicaments à base de dérivés de l’ergot du seigle. Cette question devrait faire désormais l’objet d’une réflexion à l’échelle européenne.
Les alcaloïdes de l’ergot ne devraient pas être administrés à la femme enceinte ou allaitante. L’usage du nébulisat (Diergospray) expose essentiellement à des risques d’intolérance locale : impression d’avoir le nez « bouché » et sec, ou, inversement, écoulement nasal.
L’ergotamine (Gynergène Caféiné) est proche de la DHE : la caféine a ici pour rôle de favoriser l’absorption intestinale de l’alcaloïde.
Un délai de 24 heures doit être respecté entre l’arrêt de l’administration d’un dérivé de l’ergot et l’administration d’un triptan. Inversement, un délai de 6 heures (sumatriptan, zolmitriptan) à 24 heures (naratriptan) est ménagé entre l’administration d’un triptan et celle d’un dérivé de l’ergot.
› Triptans. Les triptans constituent la référence du traitement de la crise de migraine typique. Ils induisent une vasoconstriction des vaisseaux sanguins méningés dont la vasodilatation est responsable de la douleur (agonisme 5-HT1B), et une inhibition de la libération des neuropeptides pro-inflammatoires et vasoactifs impliqués dans la genèse de la crise au niveau des voies nerveuses trigéminées (agonisme 5-HT1D). Ils n’ont que peu d’effets vasoconstricteurs périphériques, notamment sur les vaisseaux coronaires, d’où leur bon profil de tolérance Cette famille fédère de nombreux principes actifs .
Actifs sur l’ensemble de la symptomatologie migraineuse (céphalée, nausées et vomissements, photophobie, phonophobie) - à l’exception de l’aura précédant la phase céphalalgique-, ils doivent idéalement être administrés dès l’apparition de la céphalée migraineuse. Il ne faut toutefois pas les prendre lors de l’aura car ils risquent alors de potentialiser la vasoconstriction et d’être inefficaces.
L’utilisation des triptans expose à une iatrogénie bénigne et transitoire, liée à leur activité vasoconstrictrice : réactions cutanées, douleurs, sensation de chaleur ou de fourmillement, troubles circulatoires (« effet triptan » : sensation de striction ou de pesanteur dans la tête, le cou, le thorax, ne modifiant pas l’ECG et disparaissant en quelques heures), bouffées de chaleur, hypertension artérielle. Observés lorsque les précautions d’emploi et les contre-indications cardiovasculaires du traitement ne sont pas respectées, ces signes peuvent mimer une crise migraineuse.
Les différences d’activité, d’efficacité et de tolérance entre triptans demeurent minimes et cliniquement peu significatives. Il n’existe pas de tolérance ou d’intolérance croisée, ce qui rend licite l’essai d’une molécule dès qu’une autre, testée à trois reprises, n’a pas fait preuve d’assez d’efficacité.
La co-prescription d’un triptan à un AINS offre au patient migraineux, dès la première consultation, la possibilité (si besoin) de bénéficier d’un traitement plus puissant : il utilise alors en première intention l’AINS pour ne recourir au triptan qu’à la deuxième heure - en cas d’insuffisance d’efficacité de l’AINS -. Plusieurs échecs successifs de l’AINS invitent à recourir, par la suite, au triptan en première ligne.
L’abus de triptans, caractérisé au-delà de 8 à 15, voire 30, prises régulières par mois concerne souvent d’anciens abuseurs de dérivés ergotés. Il impose l’instauration d’un traitement de fond de la maladie migraineuse. Certains patients, abusant de nombreux médicaments antalgiques, peuvent finir par poser un véritable problème en raison de leur forte tendance à l’addiction.
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