Lorsqu’ils entreprennent leur stage de fin d’études, de nombreux étudiants de la filière officine ont déjà une certaine connaissance de l’exercice professionnel. Pas uniquement parce qu’ils s’y sont confrontés lors des différentes périodes d’apprentissage imposées par le cursus (stage officinal d’initiation, stage d’application), mais surtout parce qu’ils ont travaillé en pharmacie pendant leurs études. Si bien que le « stage de pratique professionnelle » n’est pas, à proprement parler, le théâtre des tout premiers pas qu’effectuent les futurs adjoints sous l’enseigne de la croix verte.
Pourtant, à bien des égards, ces six mois obligatoirement passés au sein d’une équipe en pharmacie font figure d’étape initiatique et revêtent une importance particulière dans le parcours professionnel de l’adjoint. Réglementairement parlant, le stage valide les six années d’études de l’officinal.
Sanctionné par un examen qui se compose de différentes épreuves - questions sur les plantes, substances chimiques, constantes biologiques, posologies, commentaire d’ordonnance à l’oral, rapport de stage -, il donne lieu à un certificat de remplacement qui permet d’exercer, sous certaines conditions, jusqu’à la soutenance de la thèse.
« Le stage de pratique concrétise l’entrée de l’étudiant dans le monde professionnel, indique Françoise Amouroux, professeur associé à l’université Bordeaux II et conseiller ordinal Aquitaine pour la section D. Mais c’est aussi la dernière période que passera le stagiaire en tant qu’étudiant. » Il faut donc la mettre à profit pour finaliser tout ce qui n’aurait pas été vu pendant le cursus, approfondir ce qui est resté superficiel.
C’est un moment où le stagiaire n’est pas encore un employé mais demeure un élève en apprentissage. « À ce stade, il est encore preneur de toute information. À la fin du stage, en revanche, il devra être capable de faire fonctionner l’officine. » Et bien sûr, entre l’enseignement théorique et l’exercice au comptoir, il y a un fossé que seule la pratique permet de franchir.
Une réalité qui s’est brutalement imposée à Anne-Isabelle Fournier, lorsqu’elle a effectué son stage il y a trois ans : « J’ai eu l’impression de tout reprendre à zéro. L’enseignement en faculté paraît très théorique, surtout quand on n’a pas beaucoup travaillé en officine pendant ses études. Heureusement, j’avais plusieurs pharmaciens autour de moi, dont mon maître de stage, qui m’ont encadrée en me posant les bonnes questions, celles qui font progresser. Mon seul regret est qu’il n’y ait pas plus de contacts planifiés avec l’officine durant le cursus. »
Françoise Amouroux souligne aussi le décalage qui peut exister entre ce qui est expliqué en cours et l’expérience au comptoir. « Établir un conseil adapté au patient, faire face un samedi à un manquant, chercher une solution avec un médecin, sont des situations que seule la pratique permet de surmonter. » Il y a d’autres difficultés sous la forme de disciplines entières que l’étudiant a du mal à maîtriser. « Il aura souvent peu de connaissances en comptabilité et ne saura pas comment gérer une question sur les salaires, traiter une facture ou se charger des relations avec le grossiste répartiteur, les laboratoires pharmaceutiques. »
Réelle confrontation
La liste des domaines à approfondir peut rapidement s’allonger qu’il s’agisse du fonctionnement courant de l’officine - passer une commande à un commercial, gérer le stock - ou de points plus techniques - faire face à une rupture de la chaîne du froid, à une alerte sanitaire… « Si l’équipe a une certaine expertise à transmettre à l’étudiant, celui-ci peut aussi apporter sa propre vision du travail, conclut Françoise Amouroux. Le stage est un moment d’échange intense. »
D’où l’importance pour le stagiaire de bien choisir l’officine qui va l’accueillir, ce que n’a pas omis de faire Elya Meynieu qui garde un très bon souvenir de son stage : « J’avais choisi depuis longtemps la pharmacie Nour à Talence car le titulaire, mon futur maître de stage, était intervenu quelques fois à la faculté et j’avais trouvé son approche du métier très intéressante. »
La suite va confirmer ses impressions puisque sa formation lui permettra d’acquérir de bonnes méthodes de travail, des réflexes et une certaine rigueur dans la pratique professionnelle. « Cette année-là, la pharmacie a obtenu sa certification qualité iso 9001. J’ai donc eu la chance d’apprendre à travailler suivant des procédures établies pour l’ensemble des activités officinales que j’essaie toujours d’appliquer aujourd’hui. Durant cette période, je pouvais alterner des phases de dispensation au comptoir et des phases de recherche et apprentissage personnel. Et, tous les 15 jours, je faisais le point sur les objectifs fixés au départ avec mon maître de stage. Personnellement, c’était une expérience positive et formatrice. D’un point de vue général, le stage est une première réelle confrontation avec le monde officinal qui permet de mieux cerner le travail en équipe, le management, le fonctionnement interne d’une pharmacie. »
Arrivé à la moitié de son stage, Grégory Hugues désigne aussi les spécificités de cette période de formation durant laquelle il se sent plus accompagné qu’employé : « La présence du maître de stage, sa fonction plus proche de l’enseignant que de l’employeur me confortent dans ma position de stagiaire. Mais avant tout, on a une liste de tâches à réaliser au sein de l’officine pour appréhender au mieux le fonctionnement de la pharmacie. Certaines sont moins faciles à expérimenter parce qu’elles ne sont pas pratiquées régulièrement là où on se trouve. Dans mon officine, par exemple, on fait peu d’entretiens pharmaceutiques et on ne prépare pas les piluliers pour les maisons de retraite. En revanche, on a beaucoup développé les huiles essentielles et l’aromathérapie et c’est vraiment intéressant à aborder. »
La qualité du stage et ses bénéfices sont cependant intimement liés à la philosophie du lieu d’accueil et à l’engagement du tuteur et de son équipe. « Certains de mes camarades de promotion sont considérés comme des employés à bas prix et leur formation est carrément mise de côté. » D’autres se disent corvéables à merci et même sous-payés, notamment par rapport aux stagiaires de la filière industrie. Des déconvenues que l’étudiant pourra éviter à condition de bien choisir, au préalable, son lieu et son maître de stage.
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