Moduler la perception de la douleur : les interventions psychocorporelles regroupent l’hypnose, la méditation ou encore la réalité augmentée.
Ces méthodes reposent sur un principe commun : détourner l’attention pour transformer la perception de la douleur physique ou de la souffrance psychique. Alternatives ou complémentaires à la solution chimique, ces interventions s’appuient avant tout sur la coopération entre le soignant et le patient.
Des alternatives à la portée de tous : de plus en plus d’équipes médicales au sein d’établissements hospitaliers ou médico-sociaux décident de recourir à ces méthodes non médicamenteuses pour prendre en charge l’anxiété ou la douleur. Cependant, la pratique de ces méthodes ne s’improvise pas, imposant aux soignants volontaires de se former et d’entraîner leurs partenaires dans ce processus non pharmacologique.
Pour toutes les formes de douleur : dans le cadre de soins générateurs de douleur ou chez les sujets souffrant de douleur chronique, les interventions psychocorporelles offrent des résultats intéressants, avec l’avantage d’une meilleure acceptabilité et tolérance en comparaison aux médicaments.
Méditation de pleine conscience
Diluer la douleur pour mieux la supporter : c’est le principe de la méditation en pleine conscience. Issue de la culture orientale, cette méthode a été introduite en médecine occidentale dans les années soixante-dix, via le programme de recherche MBSR (Mindfulness based Stress Reduction). Elle s’applique principalement aux situations de douleur chronique, dans le cadre du cancer par exemple. La méditation aide à ne pas focaliser sur la douleur, alors que ce phénomène est naturel. Pour cela, l’attention est portée sur d’autres éléments de l’environnement ou du corps, dont la respiration. Plus elle est diluée dans d’autres sensations, plus la perception douloureuse perd en intensité. En pratique, si la méditation en pleine conscience offre de bons résultats, l’efficacité de cette méthode est conditionnée par un entraînement régulier et un accompagnement nécessaire par des personnes formées, capables de guider les patients.
Des musiciens aux côtés des soignants : des expérimentations démontrent les bénéfices de la musique vivante ou interactive (en opposition à la musique enregistrée) sur la douleur chronique comme sur la douleur aiguë. Au point que des musiciens sont aujourd’hui qualifiés de musicothérapeutes et intègrent pleinement les équipes soignantes. Auteure du livre « le pansement Schubert » (édition Denoël), la violoncelliste Claire Oppert fait partie de ces musiciens qui s’installent dans les chambres des patients et jouent pour soulager leurs maux, tel David avec sa harpe pour calmer les tourments du roi Saül dans la culture hébraïque. Pour évaluer la pertinence scientifique de cette intervention, la musicienne a participé à un protocole expérimental incluant 112 personnes recevant des soins douloureux. Les résultats montrent que la présence de la musique vivante diminue la douleur de 10 à 50 %. Et contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, la musique classique n’a pas le monopole de l’effet antalgique ; le jazz ou le rap seraient aussi efficaces.
Une autre réalité
L’hypnose, un état naturel à exploiter : l’hypnose est une méthode de plus en plus utilisée en milieu hospitalier, notamment pour les soins douloureux ou anxiogènes, ou certaines petites chirurgies. Cette méthode exploite un phénomène physiologique naturel au cours duquel l’individu perd la notion du temps ou de l’environnement pour se retrouver dans une autre réalité. L’hypnose n’est pas un état de sommeil, mais un état de conscience modifiée. Le soignant guide le patient dans cet univers imaginé, qui permet d’intégrer la douleur dans une autre dimension et de la percevoir différemment. La difficulté de cette méthode est de synchroniser la parole de l’hypnothérapeute avec les gestes du soignant. L’hypnose est particulièrement intéressante pour les soins aux grands brûlés et cette pratique permet de diminuer les doses d’antalgiques, voire de s’affranchir carrément des médicaments.
La réalité puissance dix : autre méthode, la réalité augmentée est particulièrement utilisée en pédiatrie dans le cadre de douleurs générées par des soins récurrents. Le principe repose sur la distraction de l’esprit, via un espace virtuel. Contrairement à l’hypnose, on ne cherche pas à imaginer une autre réalité, mais à y ajouter des éléments positifs à travers l’écran d’une tablette tactile par exemple. Avec la réalité augmentée, le patient ne subit pas les soins ; il peut même se défendre et agir virtuellement contre les éléments qui génèrent sa douleur.
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