D’après les données du PIPAM (pôle interministériel de prospective et d’anticipation des mutations économiques), le marché des dispositifs médicaux (DM) pèserait environ 21,3 milliards d’euros en France, sans compter les équipements médicaux. Une estimation alléchante qui explique la volonté d’engagement de nouveaux acteurs dans la vente de ces produits.
Actuellement, ce marché se partage principalement entre les pharmaciens et des magasins spécialisés en appareillage orthopédique. Hormis certains produits spécifiques soumis à un monopole de distribution, il n’est pas restreint et séduit de plus en plus les parapharmacies et la grande distribution.
Dans dispositif médical, il y a médical !
Les pharmaciens restent leaders dans la distribution du DM et les arguments en faveur du maintien majoritaire de ce marché à l’officine sont nombreux. Le terme même de dispositif médical s’appuie sur une définition précise inscrite dans le Code de la Santé publique. La dimension médicale de ces produits, utilisés pour un usage thérapeutique ou diagnostic, ne peut être réduite à un prix.
On ne vend pas un DM, on le délivre, avec toutes les exigences que cette notion sous-entend. A l’image du médicament, le DM n’est pas un produit comme les autres, qu’il soit remboursable ou non. Il est l’affaire des professionnels de santé habitués à la dispensation, ou tout au moins formés pour garantir le bon usage du produit.
Conscient de ce prérequis, le pharmacien suit d’ailleurs une formation complémentaire et spécifique, le DU d’orthopédie, pour délivrer les orthèses et asseoir sa légitimité dans ce domaine. Enfin, le circuit pharmaceutique assure la traçabilité des produits, gage de sécurité pour les patients.
Levier de croissance, malgré la concurrence.
Outre l’aspect éthique, le marché des DM apparaît également comme un secteur prometteur pour l’économie de l’officine, malgré la concurrence croissante. L’analyse de KPMG sur les moyennes professionnelles 2015 (23e édition) montre en effet la bonne santé de ce marché, qu’il s’agisse des DM à TVA 5,5 %, 7 % et 10 % (remboursables) ou ceux à TVA 20 % (anciennement 19,6 %).
Ces derniers, qui correspondent aux DM non remboursables, représenteraient environ 10 % du CA total des officines et enregistrent une progression de plus de 5,3 %. Pour KPMG, le marché des DM sous toutes ses formes continue à gagner des parts et représente un levier de croissance pour l’officine.
Ces données sont cohérentes avec le constat de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) qui soulignait dans un rapport paru en 2010 une « explosion des dépenses de santé en ville concentrées sur les DM remboursables du titre I, notamment les affections respiratoires et les troubles du métabolisme dont le diabète ».
Les nouveaux marchés du DM
Pourtant, les pharmaciens, comme d’autres professions dont les opticiens, ont été obligés de partager certains marchés du DM sur lesquels ils étaient historiquement en situation de monopole. En 2014, la Loi Hamon a ainsi autorisé les parapharmacies et la GSM (grande surface de magasin) à distribuer des tests de grossesse et d’ovulation, dans le but de favoriser le consommateur.
À ce jour, il semble pourtant que les pharmacies résistent, et plutôt bien. En terme de prix, principal argument de Leclerc, une étude de Famille Rurales comparant les prix des tests de grossesse entre 130 points de vente dont 90 pharmacies montrait fin 2014 que ces produits n’étaient pas plus chers en pharmacie que dans les hypermarchés. En outre, les rayons des pharmacies comptaient plus de références avec des technologies variables.
Cette concurrence nouvelle, qui n’a pas fini de s’élargir, serait-elle finalement stimulante pour l’officine ? Elle lui permet en tout cas de redécouvrir des domaines sous-exploités, négligés, ou de se tourner vers de nouveaux secteurs comme celui de l’audition. Depuis 2014 par exemple, les pharmaciens peuvent proposer des aides auditives préréglées d’une puissance maximale de 20 décibels.
Le dispositif Sonalto est le principal représentant de ce type de DM qui, à la différence des prothèses auditives, ne nécessitent pas de réglage. « L’assistant auditif convient pour 80 % des cas de presbyacousie légère à modérée », explique René Lioret, directeur des opérations chez Urgo (ce dernier a repris la commercialisation de Sonalto en juin). C’est dire que le marché est prometteur.
Pour preuve, la progression rapide des ventes et la multiplication des pharmacies points de vente. « En 4 mois, nous avons comptabilisé 32 000 unités vendues. Cela correspond à une moyenne de 1 à 2 clients par mois. Sur cette période, nous avons pris 5 % du marché des appareils auditifs, majoritairement représentés par les prothèses. À ce jour, 5 000 pharmacies françaises proposent Sonalto », résume René Lioret.
En 2016, Urgo vise les 12 000 pharmacies points de vente et 10 à 15 % du marché. Outre ces éléments, le laboratoire Urgo s’appuie sur le savoir-faire du pharmacien en tant que professionnel de santé de proximité. « Nous avons mis en place un réseau de formateurs qui accompagnent les pharmaciens clients. Au sein de chaque pharmacie, des référents Sonalto sont désignés et reçoivent une formation approfondie pour sécuriser l’utilisation du produit, notamment écarter les situations nécessitant un avis médical », insiste enfin René Lioret.
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