Si autrefois la contrefaçon se cantonnait aux produits de luxe, elle touche aujourd’hui de plus en plus les biens de grande consommation et les médicaments. 11 fois plus rentable que le trafic de tabac et 25 fois plus rentable que celui de l’héroïne, le marché de médicaments falsifiés représente à lui seul près de 10,2 milliards d’euros en Union Européenne. Mais avec les médicaments, la sécurité et la santé des consommateurs est en jeu. Absence de principe actif, mauvais dosage, excipients nocifs, fausse dénomination… Un mélange toxique coûtant la vie de 700 000 à 800 000 personnes par an, principalement dans les pays en voie de développement.
Cependant, aucune partie du globe n’est épargnée. Canada, États-Unis, pays de l’Europe de l’Est, Union Européenne… La saisie de médicaments falsifiés ne cesse d’augmenter, principalement due au développement d’Internet. Plus de la moitié des médicaments vendus en ligne seraient illicites et d’après l’IRACM (Institut de Recherche Anti-Contrefaçon de Médicaments), un quart des colis postaux interceptés par les douaniers européens renfermerait des médicaments contrefaits. En tête : les antipaludiques, les antibiotiques, les médicaments contre le dysfonctionnement de l’érection, les corticoïdes, les psychotropes… Mais aussi récemment les hormones thyroïdiennes ! Autre fait inquiétant, l’introduction dans la chaîne d’approvisionnement légale de médicaments falsifiés contre le cancer.
L’exception française
La France est aujourd’hui le seul pays à être peu exposé aux médicaments falsifiés. Trois raisons principales expliquent cette exception :
- Le monopole pharmaceutique empêchant toute dispensation de médicament hors des murs d’une pharmacie d’officine ou d’une PUI (Pharmacie à Usage Intérieur) ;
- La présence obligatoire d’un pharmacien, engageant sa responsabilité à chaque étape de la chaîne du médicament : de sa fabrication à la délivrance, en passant par l’approvisionnement au sein des laboratoires et des grossistes-répartiteurs ;
- Le système de couverture sociale permettant le remboursement de la majorité des médicaments prescrits, ainsi que des prix relativement bas par rapport aux autres pays.
Malgré ce circuit de distribution sécurisé, la France ne fait pas exception dans la procuration illégale de médicaments comme les hypnotiques, les anabolisants ou autres médicaments interdits via les sites internet. Plus de la moitié des médicaments vendus en ligne étant falsifiés, donc dangereux, l’ouverture de sites Internet relatifs au commerce électronique des médicaments est soumise à une stricte réglementation en France depuis 2013. Seule une autorisation de l’Agence Régionale de Santé permet l’ouverture d’un site, obligatoirement adossé à une officine de pharmacie physique. Un logo commun aux États membres de l’Union Européenne affiché sur toutes les pages permet en outre d’identifier la légalité du commerce électronique. Rappelons que les médicaments soumis à prescription obligatoire ne peuvent être vendus sur Internet.
La lutte s’organise
Face à l’ampleur du fléau de la contrefaçon médicamenteuse, 27 pays ont signé la Convention Médicrime. Ce premier instrument juridique international, applicable en France depuis janvier 2017, pénalise la fabrication, la fourniture et le trafic de faux médicaments et de faux dispositifs médicamenteux.
Autre outil : la sérialisation des médicaments, issue de la Directive Européenne 2011/62/UE sur les Médicaments falsifiés. La raison ? Copies conformes aux originaux, les médicaments falsifiés sont presque indétectables. Certains sont même dotés de faux numéros de lot !
Le système de sérialisation comprend ainsi un dispositif antieffraction apposé sur toutes les boîtes de médicaments et un dispositif d’identification, correspondant à un numéro de série. Tous les médicaments soumis à prescription sont concernés, sauf ceux de la liste établie à l’annexe 1 du règlement délégué de mise en œuvre de la directive (médicaments homéopathiques, radiopharmaceutiques, gaz à usage médical, etc.), ainsi que l’oméprazole gélules 20 et 40 mg.
En pratique à l’officine, le pharmacien scannera le code « data matrix » de chaque boîte. L’identification unique sera lue puis vérifiée par connexion à une base nationale dont les données sont croisées avec une base européenne. La boîte authentifiée, son numéro de série sera désactivé, empêchant alors sa réintroduction dans le circuit de dispensation. En scannant ce nouveau code, le pharmacien pourra savoir instantanément si le médicament a déjà été vendu ailleurs ou s’il est issu de stocks frauduleux.
Mises en application à partir du 9 février 2019, en officine et en PUI, ces nouvelles mesures de contrôle permettront de renforcer la sécurité autour des médicaments et de protéger les patients.
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