La conjonctivite bactérienne peut être causée par différents germes (Staphylococcus aureus, Streptococcus pneumoniae ou Streptococcus viridans, Hemophilus influenzae, Moraxella catarrhalis, germes entériques gram négatif, gonocoque chez le nourrisson, Pseudomonas aeruginosa chez le porteur de lentilles de contact mal entretenues ou le patient immunodéprimé). Comme la précédente, elle est contagieuse : éviter tout contact avec les sécrétions lacrymales du patient et éviter de partager ses mouchoirs ou ses serviettes et se laver les mains après contact.
Clinique.
Les sécrétions oculaires, ici généralement purulentes, sont fréquentes sans pour autant être constantes : toutefois, des paupières « collées » le matin au réveil, l’absence de sensation de « sable » dans l’œil et d’antécédents de conjonctivite allergique sont évocateurs d’une conjonctivite d’origine bactérienne. Il n’en reste pas moins difficile de distinguer une conjonctivite bactérienne d’une conjonctivite virale car la clinique demeure trompeuse (nous proposons toutefois un tableau comparatif susceptible d’aider à fonder un diagnostic clinique).
Traitement.
Le traitement antibiotique local par collyre (prescrit sans prélèvement préalable ni antibiogramme) peut raccourcir l’évolution de l’infection d’un ou de deux jours, mais il demeure fréquent que le médecin opte pour une totale abstention antibiotique car la guérison spontanée est quasiment de règle au prix de simples règles d’hygiène locale. L’antibiothérapie réduit toutefois le risque de survenue de complications à type de kératite bactérienne. Inversement, elle expose à un risque d’augmentation des résistances des germes ou à une iatrogénie inutile puisque, dans la majorité des cas, elle est prescrite sans diagnostic préalable précis de la nature de l’agent infectieux.
Le choix du collyre antibiotique est ouvert. Le chloramphénicol, largement utilisé dans certains pays par voie locale, n’est plus disponible en France. Les options sont nombreuses pour le prescripteur : aminosides (gentamycine = Gentalline, tobramycine = Tobrex), cyclines (chlortétracycline = Auréomycine Evans, oxytétracycline = Posicycline), azithromycine (Azyfer) ou rifampicine (Rifamycine Chibret). Les fluoroquinolones (ciprofloxacine = Ciloxan, norfloxacine = Chibroxine, ofloxacine = Exocine, Monoox ou Quinofree) devraient être prescrites avec discernement pour ne pas accroître le risque de résistance. La fucidine (Fucithalmic) devrait être évitée dans le traitement des conjonctivites infectieuses car elle tend à renforcer la résistance d’Hemophilus influenzae ou du staphylocoque doré. Il existe diverses présentations locales associant plusieurs antibiotiques (Atébémyxine, Cébémyxine).
Le traitement anti-infectieux implique les deux yeux, même si l’un semble moins atteint ou non atteint car la contamination de l’œil controlatéral est inévitable.
Dans tous les cas, il est conseillé de pratiquer une toilette oculaire soigneuse et de se laver les mains de façon récurrente en les désinfectant avec une solution hydroalcoolique avant le soin oculaire.
Les conjonctivites bactériennes du nouveau-né.
Le nouveau-né peut être victime, surtout dans les pays en voie de développement, de conjonctivites à Neisseria gonorrhoeae ou à Chlamydia trachomatis. La prévention de ces deux types d’infections oculaires passe par l’instillation systématique, dès la naissance, d’un collyre antibiotique.
- Infection par Chlamydia trachomatis. Entre 2 % et 5 % des femmes enceintes seraient porteuses de ce germe, une bactérie à transmission strictement interhumaine manifestant un tropisme spécifique pour l’épithélium génital et oculaire (chez l’adulte, l’infection oculaire est généralement associée à une infection génitale du patient ou d’un partenaire sexuel) induisant une infection spécifique, le trachome. Si la transmission fœtale ascendante est décrite (infection amniotique, rupture prématurée des membranes, etc.), le germe demeure avant tout transmis au nouveau-né pendant l’accouchement, lorsque la mère présente une cervicite à C. trachomatis.
L’infection s’observe cliniquement deux semaines environ après l’accouchement, très généralement sous la forme d’une conjonctivite mucopurulente, dite « granuleuse », parfois associée à une rhinite ou à une atteinte de l’oreille moyenne.
Après de nombreuses réinfections oculaires ou lorsque l’infection n’est pas traitée, l’intérieur de la paupière finit par se scléroser et elle se retourne (entropion) : les cils entraînent alors des lésions du globe oculaire (trichiasis) et de la cornée. Non traité chirurgicalement, cet entropion-trichiasis entraîne l’apparition d’opacités cornéennes et une cécité irréversible.
Le traitement du trachome repose sur une antibiothérapie locale (érythromycine, azithromycine tétracycline) pendant quatre à six semaines au cours de la période inflammatoire : ce traitement n’élimine toutefois pas le germe. D’une façon curative, il peut aussi impliquer l’administration systémique de doxycycline (200 mg/j pendant au minimum trois semaines).
- Conjonctivite à Neisseria gonorrhoeae. La présentation ophtalmologique de l’infection, exceptionnelle chez l’adulte, est, par contre, fréquente chez le nouveau-né - la contamination se faisant, comme précédemment, lors du passage dans la filière génitale -. S’observant d’abord sous la forme d’une conjonctivite, elle peut évoluer en ophtalmie purulente susceptible d’induire une cécité définitive. Le traitement repose sur une antibiothérapie locale (fluoroquinolones) et systémique.
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