Bilan et perspective économique

La rentabilité des officines se dégrade

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Publié le 31/10/2016
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Les statistiques présentées en commun, lors de la dernière Journée de l’économie, par les experts-comptables spécialisés dans la pharmacie, montrent une rentabilité officinale qui se dégrade. Ce qui n’est pas sans conséquences sur la valorisation des fonds, calculée d’après cet indicateur. Explications et détails.

L’excédent brut d’exploitation (EBE), qui sert de base de calcul à la rentabilité des officines, est un indicateur difficile à appréhender. Pour les officines individuelles, la rémunération du titulaire n’étant pas déductible fiscalement, l’EBE est en principe assez élevé. Au contraire, dans les pharmacies soumises à l’impôt sur les sociétés, la rémunération des cotitulaires est déductible, et l’EBE est donc moins important. Pour établir des comparaisons fiables entre les officines, il faut donc retraiter l’EBE afin d'avoir un montant avant rémunération des titulaires. C’est ce qu’ont fait Fiducial, KPMG et le groupement CGP dans leur présentation commune de leurs statistiques 2015.

En pourcentage du chiffre d’affaires hors taxes, cet EBE moyen « retraité » est en baisse pour les trois cabinets d’expertise-comptable : 12,60 % pour Fiducial en 2015 (au lieu de 13,05 % en 2014), 13,17 % pour KPMG (au lieu de 13,19 %) et 12,90 % pour CGP (au lieu de 13 %). « La baisse est plus importante dans notre panel car elle tient sans doute à des éléments comme la baisse du chiffre d’affaires », fait observer Philippe Becker, directeur du département pharmacie de Fiducial.

En valeur cette fois, l’EBE ne progresse pas non plus, au contraire : en moyenne, il s’élève à 227 000 euros pour Fiducial (au lieu de 239 730 euros en 2014), à 238 600 euros pour KPMG (pratiquement inchangé) et à 273 500 euros pour CGP (au lieu de 276 200 euros). De mauvais chiffres que commente Joël Vellozzi, responsable national du réseau professions de santé chez KPMG : « il y a quatre ou cinq ans, nos chiffres faisaient apparaître une progression de l’EBE de 5 à 10 % par an. En 2015, nous sommes à + 0,3 % en moyenne. De plus, dans nos statistiques, nous avons 10 % de notre échantillon qui voient l’EBE reculer de 16 %. C’est donc une baisse du montant nécessaire pour payer les emprunts, pour se rémunérer et pour payer l’impôt. »

En outre, ces chiffres moyens ne portent que les officines en activité. « Les 180 à 200 fermetures de pharmacies chaque année ne sont pas prises en compte », précise Philippe Becker.

Une amélioration : la trésorerie

En déroulant le compte de résultat des pharmacies, les autres indicateurs de l’économie officinale ne sont guère plus réjouissants. Notamment, les frais de personnel augmentent légèrement en 2015 (ils s’élèvent de 5,1 % à 5,28 % du chiffre d’affaires, en moyenne, selon les cabinets), en raison surtout de l’effet de la baisse du chiffre d’affaires. Philippe Becker précise ainsi que « dans une officine qui fait 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires, on doit avoir cinq personnes à temps complet, salariés et titulaire compris. Tenir compte de ce ratio est très important, surtout en période de baisse de l’activité ».

Concernant la rémunération des gérants, l’étude propre à Fiducial fait apparaître une moyenne de 56 000 euros par an, mais avec près de 28 % de titulaires qui se rémunèrent moins de 3 000 euros par mois. Bien entendu, le montant de la rémunération dépend beaucoup de la taille de l’officine.

Pour la trésorerie, en revanche, la situation des officines semble s’améliorer, les chiffres de Fiducial montrant que la part des découverts supérieure à 30 500 euros diminue en 2015. Une amélioration que confirme Joël Vellozzi : « objectivement, les structures financières des officines restent saines. Le fonds de roulement est positif. Certes, il y a des officines qui ont des difficultés de trésorerie mais, structurellement, et c’est un point fort de la profession, on a des situations financières encore bonnes. »

Toujours sur ce chapitre financier, Olivier Desplats, président du groupement CGP, souligne aussi la baisse du taux d’endettement des officines. « Ce taux diminue en raison du désendettement des officines qui ont emprunté lourdement jusqu’en 2008-2009, à une époque où la valeur des fonds était très élevée, et en raison des emprunts récents sur des valeurs de fonds plus raisonnables. »

F.S

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3299