Développer de nouvelles compétences

Publié le 18/04/2013
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Jean-Luc Tomasini

Jean-Luc Tomasini
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DEPUIS plusieurs décennies, la chaîne du médicament subit, selon une fréquence quasi annuelle, des transformations, des révolutions et bientôt une transmutation. Aucun acteur n’est épargné, mais l’officine pourrait tirer avantage d’un terrain impraticable économiquement, sous réserve que l’endettement ne soit pas un obstacle majeur à un développement.

Les différentes mesures concernant plus particulièrement la pharmacie d’officine ont porté sur deux axes. Premièrement sur la rémunération, avec le passage de la marge linéaire à la marge dégressive lissée, puis de cette dernière à une répartition entre un honoraire fixe et une marge commerciale. Deuxièmement sur les conditions d’exercice officinal par le jeu de la Loi HPST et des nouvelles missions qui, même si elles ne sont pas pour l’instant une source de rémunération sérieuse, ont l’avantage d’ouvrir des perspectives sur le suivi thérapeutique et l’observance, qui constituent deux piliers qui pourraient représenter une source d’économie importante pour les pouvoirs publics. Sous cet angle, le développement des médicaments génériques a permis de réaliser des économies substantielles. Il n’en reste pas moins que les pouvoirs publics ont un double intérêt majeur à laisser se pratiquer le jeu de la libre concurrence entre les industriels de ce secteur dans l’acquisition de parts de marché auprès du corps officinal. La première raison est de réaliser des économies relativement aux prescriptions par le droit de substitution étendu accordé aux pharmaciens. La deuxième est de laisser les industriels du secteur financer la marge de l’officine.

Plusieurs mesures pourraient prochainement faire bouger les lignes de manœuvre de la pharmacie d’officine. La vente en ligne des médicaments, le statut de courtier aux achats et l’exercice en société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA). Ces trois évolutions posent actuellement de nombreuses questions mais sont susceptibles, à terme, de modifier les paysages de l’exercice et l’économie du secteur.

À terme, l’économie du médicament générique échappera progressivement à la pharmacie d’officine et les conséquences seront importantes. La pharmacie devra donc évoluer en développant de nouvelles compétences et en étant capable de justifier et de quantifier la valeur ajoutée d’un réseau relativement homogène par rapport à d’autres modèles du type anglo-saxon. La vente en ligne des médicaments pourrait permettre au pharmacien de récupérer du volume par rapport à d’autres circuits de distribution qui utilise déjà cette pratique pour se développer. L’exercice en SISA, aujourd’hui légalisé, présente encore des difficultés de gestion des flux financiers, mais il offre, au pharmacien d’officine une diversification de ses revenus qui deviendraient alors le produit des revenus du travail, du capital et de son actionnariat dans la SISA.

Le groupement devra, lui aussi, s’adapter aux nouvelles orientations et proposer aux affiliés des perspectives de développement vers le grand public en général. Le modèle proposé par le groupement devra passer d’un modèle B to B basé sur les achats et les services à l’officine, vers un modèle B to C orienté vers les usagers de la chaîne du médicament via les affiliés. Les nouvelles technologies basées sur la gestion confidentielle des données pourraient apporter une réelle plus value en terme service de santé public. Le champ d’investigation pouvant passer par la prévention secondaire, le suivi thérapeutique, l’observance, la télémédecine, la vente de médicaments en ligne. Cette dernière perspective, selon le vœu des pouvoirs publics, et sous contrainte européenne, pourrait amener à faire baisser le prix du médicament non remboursable et, par effet direct, reporter vers ce secteur les comportements de « consommation » des médicaments rattachés à une consultation médicale.

JEAN-LUC TOMASINI, PRÉSIDENT D’EUROPHARMACIE SAS

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3000
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